Présentation du mouvement humanitaire au Royaume Uni

 
 
Nombre d'ONG de solidarité internationale -300 en 1991, dont 90 recevant des fonds publics
-400 en 1997, dont 230 recevant des fonds publics
Plates-formes d'ONG laïques -BOND (British Overseas NGOs for Development), depuis 1993, environ 250 membres : fonction de lobbying
-DEC (Disasters Emergency Committee), depuis 1963, 13 membres : fonction de coordination de la collecte de fonds et de redistribution des financements obtenus au prorata de l’implication des diverses ONG impliquées dans une crise humanitaire. Le secrétariat de cette structure est assuré par la Croix-Rouge britannique, une des cinq organisations fondatrices du DEC avec la CAFOD, Christian Aid , Oxfam et SCF
-NCVO (National Council for Voluntary Organizations), depuis 1980, héritier du NCSS (National Council for Social Service) créé en 1919 : revendique 6 800 ONG membres en 2009, dont le BOND
Plates-formes d'ONG religieuses -n.d.
ONG " parapubliques " -Voluntary Service Overseas (VSO), créé en 1958 et financé à plus de 80% par son administration de tutelle
Statut des ONG -Charities Act 1853, 1960, 1985, 1992, 1993 et 2006
Avantages fiscaux -pour les particuliers : défiscalisation des dons à partir d’un certain montant
-pour les ONG : exemptions de l’impôt foncier, de la taxe d’habitation, des droits de succession et de l’impôt sur les profits mais pas de la TVA (Income and Corporation Taxes Act de 1988)
Système d'accréditation
-Charities Commissioners for England and Wales
 
Aide publique au développement
(APD)
$7,9 milliards (2004)
% APD/PNB 0,36 (2004)
% APD destiné aux ONG
(non compris les avantages fiscaux)
-0% (1980), 1% (1984), 2% (1985), 4% (1989), 7% (1991), 9% (1995), 3% (1999), 5% (2000), 8% (2001), 11% (2002), 9% (2003), 5% (2009)
-dont un tiers pour des actions d’urgence, essentiellement via le Disaster Emergency Committee
-en place depuis 1975 à travers un Joint Funding Scheme
Proportion moyenne de financements privés dans les ressources des ONG de solidarité internationale -53% (1993)
Champs d'interventions géographiques des ONG, par ordre décroissant d'importance Afrique subsaharienne, Asie Centre & Sud, Amérique latine/Caraïbes, Asie Est & Océanie, Afrique du Nord/Proche orient
Institution gérant l'APD DFID (Department for International Development), fondé en 1997, détaché du Foreign Office et héritier de l’ODA (Overseas Development Administration)
Organisme de contrôle des ONG -Charities Commissioners for England and Wales
Interface ONG / Etat -NGO Unit, DfID
Financement public des ONG du Sud -oui, y compris en plaçant des VSO dans les ONG du Sud.
-surtout au Kenya, en Afrique du Sud, au Bangladesh, au Pakistan et en Asie du Sud (via le Bangladesh Rural Advancement Committee ou la Fondation Aga Khan, par exemple).

 



Les ONG humanitaires du Royaume Uni sont extrêmement puissantes, parmi les plus développées du monde occidental. Face à un Etat relativement décentralisé et ouvert à un partenariat avec le secteur privé, elles ont en effet pu compter sur la générosité des Britanniques, dont les contributions à des œuvres de charité sont très élevées. A la différence d’autres pays européens où les services publics restent du domaine du pouvoir central, les charities jouent ainsi un rôle essentiel dans l’économie sociale du Royaume Uni. Tous les chiffres le confirment, quoiqu’il en soit des majorités conservatrice ou travailliste au pouvoir.

En 1977, déjà, les associations caritatives totalisent des revenus d’environ £3 milliards, équivalant à 3% du PIB (Produit intérieur brut), et elles emploient 200 000 salariés, soit 2,5% de la main d’œuvre du pays si l’on y ajoute l’apport des volontaires et des bénévoles. L’arrivée au pouvoir des conservateurs, qui se traduit par un désengagement de l’Etat, accentue ensuite la tendance. A en croire les chiffres de la Charities Aid Foundation, le secteur non lucratif alimente 3,7% du PNB (Produit national brut) en 1985, plus si l’on inclut les syndicats. A elle seule, la contribution des volontaires cette année-là équivaut désormais à 400 000 emplois à temps plein, soit 1,5% de la force de travail du pays. En 1990, encore, les ressources financières des 171 434 organisations caritatives déclarées représentent 3,4% du PIB et permettent d’employer 482 000 personnes, soit 2,2% de la main d’œuvre britannique. Alors que le pays sort à peine de la crise économique, le secteur non lucratif au sens large du terme (écoles privées et congrégations religieuses incluses) connaît une croissance particulièrement impressionnante au cours de la décennie qui suit. D’après le National Centre for Volunteering, ses ressources dépassent alors les £45 milliards en 1995. Selon Lester Salamon et Helmut Anheier, une telle manne représente 6,2% de l’emploi non agricole et 6,6% du PIB, jusqu’à 9,2% si l’on comptabilise la part du bénévolat.

Plusieurs facteurs expliquent en l’occurrence l’importance des ONG en Grande-Bretagne. Il y a d’abord, historiquement, un profond enracinement du secteur non lucratif dans la vie sociale. Le libéralisme né de la Révolution Industrielle n’y est pas pour rien, qui érige la liberté associative en droit fondamental, constitutif de tout gouvernement démocratique. Le XIXè siècle voit ainsi se multiplier et se séculariser des organisations caritatives qui, progressivement, débordent du champ religieux pour porter assistance aux démunis. Dans l’Angleterre victorienne, en particulier, l’assistance sociale de l’Etat est accusée d’encourager la mendicité, d’entraîner des gaspillages, d’arracher les pauvres à leur communauté et de les empêcher de se prendre en charge. Alimentées par les théories du darwinisme social, qui font de la misère une tare héréditaire, les discours sur l’oisiveté contribuent donc à propulser l’initiative privée sur le devant de la scène, souvent par opposition aux pouvoirs publics.

C’est d’ailleurs à cette époque que les autorités commencent à légiférer et réglementer le secteur non lucratif en distinguant plusieurs types d’organisations : les institutions privées établies par charte royale et dotées d’une personnalité juridique ; les fondations caritatives (charitable trusts), dont le statut date du Moyen âge et dont les membres des conseils d’administration ne peuvent être rémunérés ; les sociétés philanthropiques (unincorporated associations), très en vogue au XVIIIè siècle ; les associations à responsabilité limitée (companies limited by guarantee), désormais encadrées par le Companies Act de 1862 ; et les coopératives ou les mutuelles (friendly societies), dont l’existence est reconnue depuis une loi de 1793, le Rose’s Act. Inadaptées au monde moderne, nombre de ces structures devaient ensuite disparaître, à commencer par les sociétés philanthropiques. Pour certaines héritières des guildes médiévales, les coopératives, par exemple, sont largement passées de mode : malgré de nouvelles lois en 1965 et 1974 (l’Industrial and Provident Societies Act puis le Friendly Societies Act), on n’en recensait plus, en 1970, qu’un quart du nombre enregistré en 1914.

De fait, la progression des organisations à but non lucratif n’est pas linéaire. Après la Seconde Guerre mondiale, notamment, les nationalisations du gouvernement travailliste freinent pendant un temps le développement du secteur privé et consacrent le triomphe de l’Etat-providence. Selon un sondage de 1948 cité par Benedict Nightingale, 99% des Britanniques considèrent alors que l’assistance sociale est du ressort des pouvoirs publics et non des ONG. Celles-ci ne peuvent qu’améliorer la qualité de vie et doivent laisser à l’Etat le soin de répondre aux besoins de première nécessité. Il n’en demeure pas moins que leur nombre ne cesse d’augmenter, d’abord lentement dans les années 1960, puis plus rapidement. Si l’on inclut les syndicats, les groupements socioprofessionnels, les églises et les clubs sportifs, le pays compte ainsi quelque 350 000 organisations volontaires à la fin des années 1970, dont les deux cinquièmes affichent une vocation humanitaire. Outre l’Ecosse, qui recense environ 16 000 ONG en 2005, les chiffres de la Charity Commission, un organisme gouvernemental qui répertorie les associations caritatives en Angleterre et au Pays de Galles depuis 1961, montrent à leur manière l’ampleur du phénomène, à raison de 71 000 entités officiellement enregistrées en 1968, 76 648 en 1970, 129 212 en 1978, 136 000 en 1980, 143 150 en 1982, 154 135 en 1985, 161 000 en 1987, 170 357 en 1992, 184 322 en 1998 et 167 752 en 2006.

Par rapport à leurs homologues qui travaillent uniquement en Grande-Bretagne, il s’avère en outre que les associations de solidarité internationale croissent encore plus vite. La Charity Commission en dénombre 8 777 de la sorte en 1998, contre 7 280 en 1992, 3 483 en 1982 et 1 563 en 1970. Pendant ce laps de temps, leur proportion passe de 2% à 4,8% du nombre total de charities répertoriées en Angleterre et au Pays de Galles. Désormais, le secteur emploie à lui seul 68 000 personnes selon des chiffres de 1996, dont 58% de ressortissants du tiers-monde. A l’instar des autres charities, son dynamisme ne date en l’occurrence pas d’hier et plonge ses racines dans l’histoire. Le mouvement missionnaire chrétien en a d’abord posé les prémisses : le département outre-mer de l’Eglise d’Ecosse (Church Of Scotland World Mission), par exemple, affiche une vocation « humanitaire » depuis… 1560 ! Au XIXè siècle, l’entreprise coloniale et les guerres de conquête territoriale ont ensuite pris le relais et suscité leur contingent de « bonnes œuvres » avec des figures comme l’infirmière Florence Nightingale.

De ce point de vue, l’engouement pour des causes humanitaires n’est absolument pas une nouveauté, y compris sur le plan financier. Selon Andrew Thompson, la générosité du public en faveur des victimes britanniques de la guerre des Boers en Afrique du Sud en 1901 n’a ainsi rien à envier, toutes proportions gardées, au concert Live Aid qui fut donné au moment de la grande famine éthiopienne de 1985. Organisé par le chanteur irlandais des Boomtown Rats, Bob Geldof, l’événement a, rappelons-le, réuni les grands noms du showbiz, à commencer par Paul McCartney, Mike Jagger, Bob Dylan, Elton John, Phil Collins et Crosby, Still, Nash & Young. Sa médiatisation allait permettre de collecter près d’une centaine de millions d’euros pour secourir les victimes de la famine en Éthiopie en juillet 1985 —un record bientôt battu par le tsunami asiatique de décembre 2004.

Un soutien continu des pouvoirs publics

Une rapide analyse financière montre toutefois que les charities ne dépendent qu’en partie des contributions volontaires des particuliers. Relativement à d’autres pays, le milieu associatif en Grande-Bretagne ne se distingue pas seulement par le développement précoce de ses techniques de marketing et de mailing pour collecter des fonds. Une de ses particularités est aussi que les ONG ont l’habitude de s’autofinancer par des activités commerciales, magasins ou ventes par correspondance. Autre caractéristique : un appui jamais démenti de l’Etat sous forme de subventions ou de facilités fiscales. Dès 1799, en l’occurrence, les organisations caritatives ont été exemptées de l’impôt sur le revenu que les autorités venaient juste de créer. Depuis lors, ces privilèges ont perduré avec moult subventions, y compris pour les associations de solidarité internationale après la vague de décolonisation et la mise en place d’une politique d’aide au développement dans les années 1960. Toutes ONG confondues, en incluant les écoles privées mais pas les congrégations religieuses, la part des subventions publiques dans les ressources du secteur non lucratif a même augmenté de 39% en 1990 à 46% en 1995 d’après les chiffres recueillis par Lester Salamon et Helmut Anheier.

Soucieuses de sauvegarder leur indépendance politique, certaines associations de solidarité internationale ont d’ailleurs dû réagir en s’engageant dans les années 1970 à limiter la proportion de financements étatiques à un plafond maximal de 10% de leurs revenus. Avec l’arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur de Margaret Thatcher, qui allait restreindre le budget du ministère de la Coopération à partir de 1980, elles devaient ensuite rehausser ce seuil à 30% pour Christian Aid et 20% pour SCF ou Oxfam. Paradoxalement, destinés à s’autofinancer et à s’affranchir de la tutelle des autorités ont alors assaini les relations des associations de solidarité internationale avec l’Etat. Ainsi, les charities britanniques ont pu compter sur le soutien continu des équipes qui se sont succédées au pouvoir après le départ de Margaret Thatcher en 1990. Les alternances de gouvernements conservateur ou travailliste n’ont pas fondamentalement changé la donne et les associations de solidarité internationale sont progressivement devenues des partenaires incontournables du ministère de la Coopération (DFID). Lors des deux décennies qui ont suivi la fin de la guerre froide, remarque Catherine Agg, la part de l’aide publique au développement qui leur est dévolue n’a cessé d’augmenter malgré la nouvelle priorité affichée depuis le début des années 2000, qui consiste à aider directement les Etats sans passer par l’intermédiaire des ONG.

Contrairement aux idées reçues, il n’y a en effet pas lieu de supposer que des gouvernements conservateurs ou travaillistes seraient mieux ou moins bien disposés à l’égard des associations de solidarité internationale. D’un côté, les travaillistes entretiennent des liens étroits avec le secteur non lucratif en général, à commencer évidemment par les syndicats et des organisations comme War on Want ou Oxfam. D’un autre côté, la primauté qu’ils accordent au rôle de l’Etat n’est pas forcément favorable aux ONG. Les conservateurs, pour leur part, s’opposent aux associations de solidarité internationale quand ils diminuent l’aide au développement pour réaliser des économies budgétaires. Mais leur idéologie libérale, qui prône un effacement des pouvoirs publics, consacre le rôle social d’ONG destinées à suppléer plus efficacement aux lacunes de l’Etat-providence. Conjugué à l’afflux de financements de l’Union européenne, le triomphe de l’économie de marché explique en grande partie la formidable croissance des ONG britanniques au cours des années 1980. Spécificité de l’ère Thatcher, les rivalités entre le pouvoir central et les autorités régionales ont également contribué à revaloriser le secteur non lucratif avec le soutien des collectivités locales.

Le contrôle de l’Etat

La sérénité des relations entre l’Etat et les ONG ne doit cependant pas laisser à penser que le milieu associatif est complètement laissé à lui-même. En Ecosse, les charities sont supervisées directement par les services fiscaux et, depuis 1998, par un organisme spécifiquement créé à cet effet, l’OSCR (Office of the Scottish Charity Regulator), dont les pouvoirs ont été renforcés en 2005 à la suite de scandales financiers en 2003. De même, en Irlande du Nord, elles sont surveillées par le département des finances en vertu du Charities Act (Northern Ireland) de 1964. En Angleterre et aux Pays de Galles, enfin, elles sont encadrées par une Charity Commission qui a des pouvoirs beaucoup plus étendus que son équivalent pour les mutuelles, le Registry of Friendly Societies. En principe, le Foreign Office peut également interdire une association de solidarité internationale dont les activités à l’étranger seraient contraires aux intérêts britanniques.

Le Statut de 1601, qui annonce la sécularisation de l’aide, est en l’occurrence la première tentative des pouvoirs publics de surveiller les activités et les éventuels abus des œuvres caritatives. Une loi fameuse de 1834 vise ensuite à réprimer la mendicité en établissant un organisme chargé d’organiser les charities de manière à lutter contre l’oisiveté et la pauvreté, la Society for Organising Charity and Repressing Mendicity. Aboutissement de la Commission d’enquête de Lord Henry Brougham, qui avait mis 21 ans à rendre ses conclusions dans un rapport publié en 1840, une Charity Commission est finalement créée en 1853. Malgré les lois de 1855 et 1860 qui la pérennisent, cette institution ne dispose cependant pas de pouvoirs d’investigation et ne peut qu’émettre des recommandations. Il faut attendre le Charities Act de 1960 pour que son mandat soit élargi en l’autorisant à vérifier le caractère altruiste d’une organisation, à demander des modifications et à apprécier la nature humanitaire des programmes menés.

Les ONG, qui dénoncent les interférences gouvernementales, sont alors contraintes de déposer leurs statuts auprès des autorités et de rendre des comptes. C’est surtout au moment de leur enregistrement que s’exerce le contrôle de la Charity Commission. Avec trois fonctionnaires nommés par le ministère de l’Intérieur, treize employés chargés de mener des enquêtes et un doublement de ses effectifs entre 1957 et 1962, celle-ci peut rejeter les demandes d’exemption fiscale sans fournir d’explications. Sur 60 000 dossiers déposés entre 1960 et 1971, par exemple, 1 380 n’aboutissent pas ; or de pareils rejets sont irrévocables car il s’agit de décisions administratives qui ne permettent pas de faire appel. Par la suite, la Charity Commission est également amenée à développer sa réactivité et sa capacité d’investigation à propos des ONG déjà homologuées. L’organisme, qui se décentralise et ouvre des bureaux régionaux pour mieux couvrir l’ensemble du pays, renforce notamment sa coopération avec les services fiscaux de l’Inland Revenue pour lutter contre les fraudes et partager des informations confidentielles en vertu des nouvelles dispositions d’une loi de 1986, le Finance Act. Autre avancée, des amendements de 1992 et 1993 au Charities Act de 1960 l’autorisent aussi à enquêter sur les fondations ou les entreprises qui ne sont pas directement opérationnelles mais qui lèvent des fonds pour des œuvres sociales ou philanthropiques. Depuis 2006, encore, la Charity Commission dispose de son propre tribunal ad hoc pour examiner les requêtes en appel de ses décisions. De nouvelles dispositions obligent par ailleurs les ONG à rendre davantage de comptes, contrainte qui donne lieu à la création en février 2007 d’un organisme chargé d’autoréguler le milieu en certifiant la transparence de ses adhérents : le FRSB (Fundraising Standards Board).

Le dispositif se heurte cependant à d’importantes limites. Malgré la collaboration de 400 agents, d’abord, la Charity Commission manque d’enquêteurs pour exiger et vérifier les comptes et les activités des ONG, qui ne sont pas tenues d’effectuer des audits. En principe, les organisations caritatives sont censées rendre des rapports tous les ans. Mais à peine 40% se soumettent effectivement à cette obligation si l’on en croit les chiffres de la Cour des Comptes (le National Audit Office) pour la période 1982-1987. Des barrières juridiques viennent en outre freiner les possibilités d’investigation, car la mise en œuvre d’enquêtes nécessite au préalable le consentement du conseil d’administration de l’ONG concernée. De plus, la Charity Commission ne bénéficie pas toujours d’un soutien énergique de la classe politique et son rapport annuel est rarement discuté au Parlement.

Enfin et surtout, elle intervient essentiellement en cas de gabegie ou d’escroquerie. Elle n’a pas pour fonction de tester la qualité des programmes humanitaires et ne se préoccupe pas de protéger les donateurs d’un éventuel détournement de leur argent. Pour l’Etat, ses objectifs sont plutôt de nature économique et politique. Ils consistent à vérifier que les ONG ne sont pas des entreprises frauduleuses, des organes de propagandes ou des officines partisanes. Depuis longtemps, on s’inquiète en effet de la façon dont l’auto-proclamation humanitaire de certaines organisations peut servir à abriter des activités lucratives. Dès 1863, par exemple, le chancelier de l’Echiquier William Gladstone a (en vain) menacé de supprimer les avantages fiscaux des ONG, arguant qu’elles échappaient à tout contrôle. Par la suite, d’autres se sont également opposés au renouvellement automatique et illimité des privilèges dont jouissaient les organisations humanitaires. Le vote du Charities Act de 1960 a alors été l’occasion de préciser les choses en conditionnant l’homologation d’une ONG à son caractère altruiste et non lucratif. A la différence des mutuelles ou des syndicats qui travaillent au profit de leurs adhérents, le dispositif interdit ainsi à une charity de mener des activités bénéficiant seulement à ses membres, même si les écoles privées ou les organisations humanitaires sont autorisées à monter des fonds de retraite pour leurs employés.

La dimension politique des ONG humanitaires

Outre les aspects économiques, la Charity Commission a aussi pour fonction de contrôler le devoir de réserve des ONG qu’elle a homologuées. A l’instar des Etats-Unis, de l’Irlande, du Canada ou de l’Australie, la Grande-Bretagne fait partie de ces quelques pays qui restreignent officiellement l’engagement politique et les activités de lobbying des organisations humanitaires. L’interdiction d’exercer des pressions sur le gouvernement est en l’occurrence assez ancienne puisque la jurisprudence dans ce domaine date de la fin du XIXè siècle. En vertu d’un fameux jugement rendu par Lord Edward Macnaghten en 1891, les quatre types d’activités qu’une œuvre de charité est autorisée à mener consistent en principe à combattre la pauvreté, éduquer les masses, poursuivre des objectifs d’utilité publique et… promouvoir la religion ! Typique de l’époque, l’encouragement au prosélytisme apparaît aujourd’hui contradictoire dans des régimes de séparation de l’Eglise et de l’Etat. Tandis que les organisations laïques n’ont pas le droit de monter des campagnes en faveur des pays en développement, les mouvements religieux peuvent légalement interpeller les députés à propos de la politique de planification familiale, de l’avortement, du divorce&he llip; ou de l’interdiction de travailler le dimanche avec des lobbies conservateurs comme la Lord’s Day Observance Society. Encore faut-il d’ailleurs vénérer un Dieu, ce qui exclut l’Eglise de Scientologie ou les groupements éthiques en dépit des recommandations du rapport Arnold Goodman de 1976, qui préconisait d’accorder un statut caritatif aux œuvres à vocation morale.

D’une manière générale, il s’avère très compliqué d’apprécier objectivement le caractère politique d’une organisation « humanitaire », au sens large du terme. En principe, la loi interdit la propagande mais pas les efforts de recherche et d’éducation à but non lucratif et d’intérêt public. Or la limite est parfois difficile à cerner. Parmi les organisations de défense des droits de l’homme, par exemple, la Charity Commission a écarté la candidature d’Amnesty International mais avalisé des lobbies comme l’Anti-Slavery Society, la Howard League for Penal Reform et le Minority Rights Group, qui luttent contre l’esclavage, la peine de mort et la répression des minorités. Le refus d’homologation a de toutes façons été contourné en créant des succursales éducatives ou caritatives qui, elles, ont bénéficié d’exemptions fiscales, à l’instar du Prisonners of Conscience Appeal Fund pour Amnesty International ou du Cobden Trust pour le National Council for Civil Liberties.

Les critères de sélection pour obtenir un statut caritatif laissent ainsi apparaître une grande part d’arbitraire. Du temps où le gouvernement de Margaret Thatcher était au pouvoir, notamment, la Charity Commission a été accusée de privilégier les ONG de droite au détriment de leurs homologues de gauche. De fait, elle a accordé des facilités fiscales aux adhérents de clubs de tirs en Irlande du Nord, aux experts militaires de l’Institute of Strategic Studies à Londres, aux conservateurs du Moral Re-armament à Oxford et aux membres du British Atlantic Committee, un lobby favorable à l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord). En revanche, elle a réprimandé ou tenté d’exclure des ONG proches du parti travailliste, à commencer par Oxfam et War on Want. Ses recommandations de l’époque, publiées dans son rapport annuel de 1981, invitaient clairement les organisations caritatives à se démarquer de la mode progressiste du tiers-mondisme, quitte à leur interdire de témoigner et de dénoncer les exactions observées dans les pays où elles travaillaient. Selon Terence Fitzgerald, un des responsables les plus conservateurs de la Charity Commission, « les associations de solidarité internationale [devaient] éviter : d’essayer de remédier aux causes structurelles de la pauvreté ; d’exercer des pressions sur les gouvernements en vue d’obtenir des réformes (par exemple pour redistribuer les terres, reconnaître les syndicats ou respecter les droits de l’homme) ; de chercher à éliminer les injustices sociales, politiques et économiques ».

D’autres ont pourtant développé une vision plus souple des activités de lobbying et de témoignage des ONG humanitaires, à l’instar de Robin Guthrie, qui devait succéder à Terence Fitzgerald au début des années 1990. Dès 1950, une commission parlementaire présidée par Lord Harry Louis Nathan, qui devait poser les bases du Charities Act de 1960, avait admis que les associations à but non lucratif pouvaient déborder de leur mandat initial pour évoluer et se moderniser sans pour autant compromettre leur statut fiscal. Dans un rapport de 1976, encore, le National Council of Social Service avait accepté les pratiques de lobbying auprès des parlementaires du moment que leur objectif principal était de servir la communauté et non de promouvoir des intérêts industriels ou commerciaux. Si l’engagement politique échappait au domaine caritatif du fait de l’imprévisibilité de son incidence sur le bien commun, une ONG pouvait parfaitement mener des activités de plaidoyer « subsidiaires », à la périphérie de son mandat.
A moins d’interdire toutes les charities, il serait de toutes façons irréaliste d’avoir une conception trop restreinte de la neutralité humanitaire. D’après un sondage du National Council for Voluntary Organisations en 1990, les trois quarts des ONG britanniques disent exercer des activités de plaidoyer ! Certes, les organisations humanitaires ne sont plus aussi politisées que pendant la grande vague tiers-mondiste des années 1970. La professionnalisation des opérations de secours et une méfiance grandissante à l’égard des gouvernements des pays du Sud ont en effet conduit un bon nombre d’ONG à abandonner leurs combats d’antan et leurs positions les plus intransigeantes, quitte à placer l’accent sur le consommateur plus que le citoyen.

La mouvance humanitaire n’en demeure pas moins marquée par d’importantes différences idéologiques, notamment du côté des centres de recherche spécialisés dans le lobbying. Fondé en 1965 par le Dr. Ernest Schumacher, auteur du fameux slogan Small is Beautiful, l’ITDG (Intermediate Technology Development Group) a par exemple été suspecté de sympathies pour le parti conservateur à cause de ses positions en faveur de la petite entreprise. Fort d’une centaine de salariés et de nombreux conseillers universitaires, il sert en l’occurrence de think-tank au ministère de la coopération britannique, qui finance une bonne moitié de son budget. A l’autre extrême de l’échiquier politique, on trouve des plates-formes progressistes comme le WDM (World Development Movement), qui s’est fait remarquer en organisant le 22 octobre 1985 une manifestation de 20 000 personnes devant le Parlement pour demander au gouvernement conservateur une augmentation de l’aide publique au développement.
Depuis le 11 septembre 2001, cependant, la Charity Commission s’est surtout préoccupée des ONG issues de la diaspora musulmane, plutôt que des mouvances tory ou travailliste. Ont notamment été visées des associations culturelles comme la Muslim Cultural Society d’Omar Bakri Mohamed et des fondations éducatives comme le Muntada Islamic Trust (al-Muntadah al-Islamiyya). La première était animée par un leader d’origine syrienne, professeur à la London School of Shariah et président de l’association religieuse des « Immigrés » (al-Muhajiroun), qui s’était vanté d’avoir envoyé des combattants en Tchétchénie, en Bosnie, au Cachemire et en Afghanistan pour le compte d’un front islamique, l’Islam Political Front. Financée par l’Arabie Saoudite, la seconde était quant à elle suspectée d’avoir convoyé des fonds au profit de groupes terroristes et ses bureaux ont été fermés pour ces raisons au Kenya en 1998 puis au Nigeria en 2004.

Par la suite, la surveillance des ONG musulmanes s’est évidemment accrue à mesure que la menace islamiste prenait corps et que des attentats étaient perpétrés sur le sol britannique. Dès octobre 2002, les autorités gelaient les comptes de la branche britannique de la BIF (Benevolence International Foundation). En janvier 2003, c’est ensuite sur la base d’une plainte de la Charity Commission que Scotland Yard devait effectuer un raid contre la mosquée de Finsbury Park où était basée l’association al-Muhajiroun et où officiait un imam d’origine égyptienne, Abou Hamz al-Masri, connu pour ses diatribes contre l’Occident chrétien et finalement traduit en justice en octobre 2004. A l’instigation du Département d’Etat américain et des Israéliens, une ONG de solidarité avec les Palestiniens, Interpal, a également été suspectée en août 2003 de financer le Hamas, classé comme un groupe terroriste. Les comptes de l’organisation ont été gelés jusqu’à ce que les autorités britanniques reviennent sur leur décision parce que Washington n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour étayer ses accusations. La Charity Commission a par ailleurs ouvert une enquête sur la MIRO (Mercy International Relief Organisation) à la mort en mars 2004 de son directeur Ayub Thakur, un exilé du Cachemire qui avait financé la résistance armée contre l’Inde. Enfin, les autorités se sont intéressées de près au Crescent Relief, une association créée à Birmingham par Abdul Rauf pour venir en aide aux victimes du tremblement de terre de 2005 au Pakistan. Suspectés de comploter un attentat terroriste, cinq volontaires de l’ONG ont été arrêtés le 10 août 2006, dont le fils du fondateur de l’organisation, Rashid, arrêté au Pakistan et présenté comme le cerveau de l’affaire.

D’une manière générale, la Charity Commission a resserré son contrôle en se réservant le droit d’exiger la fermeture des associations qui jouissaient d’un budget supérieur à £10 000 et qui ne lui remettaient pas de rapports financiers dix mois après la fin d’une année fiscale. Au-delà du monde islamique, d’autres ONG issues des diasporas ont ainsi fait l’objet d’investigations poussées à cause de leurs liens avec des mouvements de lutte armée. Cela a notamment été le cas des Tamouls originaires du Sri Lanka, qui comptent de nombreuses organisations de solidarité, telles la CANE (Cancer Aid for North/East Sri Lanka) ou la TEEDOR (Tamil Eelam Economic Development Organisation). Certaines paraissent fort honorables et n’ont guère attiré l’attention des autorités, à l’instar de la TCHA (Tamil Community Housing Association), qui s’est d’abord appelée Tamil Refugee Housing Association et qui s’occupe de loger des demandeurs d’asile tamouls dans les environs de Londres. D’autres ont en revanche été accusées de financer les guérilleros des LTTE (Liberation Tigers of Tamil Eelam), les « Tigres », qui luttent pour l’indépendance et sont considérés comme un groupe terroriste par la Grande-Bretagne.

En octobre 2000, la Charity Commission a ainsi démarré une enquête sur la TRO (Tamil Rehabilitation Organization), le Tamil Refugee Action Group et le Tamil Refugee Training and Education Centre. Ce dernier a en effet été lancé, entre autres, par Ramalingam Vallipuram Ramachandran, un ancien pilote qui, connu sous le nom d’Anton Rajah, a participé à la création d’une armée de l’air pour les LTTE avant de devenir un porte-parole officiel du groupe. De son côté, la TRO compte parmi ses membres fondateurs le Docteur Sathasivam Maheswaran « Periya », qui a également contribué à l’acquisition d’avions pour la LTTE avant d’être arrêté par les autorités de Colombo en 1993, de faire de la prison et de partir en exil à Londres. De son propre aveu, la branche britannique de l’organisation, dont le siège mondial est en Australie, a transféré vers la péninsule de Jaffna £ 2,5 millions de 1995 jusqu’à ce que la Charity Commission gèle ses comptes bancaires fin 2000. Selon les services de renseignement du MI6 (Military Intelligence), cités par Rohan Gunaratna, les fonds envoyé ont servi à acheter des armes et pas seulement à mener des programmes humanitaires de déminage ou d’aide aux orphelins.
Assurant également une fonction diplomatique, la TRO a par ailleurs joué un rôle d’ambassade officieuse dans les pays où les LTTE étaient officiellement interdits de séjour, de la Grande-Bretagne à la Malaisie. Elle a par exemple ouvert des bureaux au Botswana en 1995 pour tester la réaction des autorités et s’implanter en Afrique du Sud, où existe une importante diaspora tamoule susceptible de verser son obole à la cause. Son interdiction en Grande-Bretagne par la Charity Commission, qui y a placé un administrateur d’office en mai 2002, n’a d’ailleurs pas mis fin à ses activités et d’autres implantations ont continué de fonctionner en Europe. Son homologue français, l’Organisation de réhabilitation tamoule, opère ainsi en banlieue parisienne depuis le siège de la Tamil Television Network à La Courneuve, où elle a levé des fonds en faveur des victimes du tsunami de décembre 2004 au Sri Lanka. Peu après le raz-de-marée, la TRO a en l’occurrence ouvert quatre orphelinats où les humanitaires étrangers ont surtout trouvé des enfants non accompagnés, suspectés d’avoir été arrachés à leur famille pour être embrigadés de force dans les rangs des LTTE.

Qu’il s’agisse d’organisations islamistes ou tamoules, la Charity Commission a finalement concentré ses efforts sur les associations issues des diasporas dans le cadre de la guerre contre le terrorisme. Ce faisant, elle a montré que, faute de critères universellement reconnus et applicables, ses préoccupations répondaient essentiellement à des questions de politique intérieure et extérieure. Vingt ans auparavant, les associations britanniques qui avaient soutenu des mouvements de libération « progressistes » n’avaient pas autant ému. Le Namibia Support Committee, par exemple, émanait pourtant de la SWAPO (South West Africa People’s Organisation), qui luttait pour l’indépendance de la Namibie, tandis qu’Afghanaid alimentait les moudjahidin qui combattaient les troupes d’occupation de l’Armée Rouge. Dans le même ordre d’idées, Oxfam a financé les rebelles de l’EPLF (Eritrean People’s Liberation Front) et du TPLF (Tigray People’s Liberation Front) en Ethiopie. La différence est que ces mouvements n’étaient pas qualifiés de terroristes, quoiqu’il en soit de leurs pratiques à l’égard des populations civiles et du droit humanitaire.

​Marc-Antoine Pérouse de Montclos

Sources écrites

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