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Fédération internationale des ligues des droits de l’homme
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Fédération internationale des ligues des droits de l’homme - Commentaires




6) Les relations avec les forces politiques


-Les organisations membres de la FIDH diffèrent beaucoup d’Amnesty International car elles ne s’empêchent pas d’avoir des engagements partisans et de surveiller les droits de l’homme dans leur propre pays. Ont, de ce point de vue, été régulièrement enfreints les articles 6 et 15 des statuts de la LDH française, déposés le 4 juin 1898, qui interdisaient de participer aux luttes électorales et proclamaient la démission automatique des Ligueurs entrant au gouvernement. Non sans ironie au vu de la culture anticléricale de l’organisation, Jean et Monica Charlot comparent ainsi la Ligue à l’Eglise catholique, évidemment avec des options opposées ! « Elles se refusent toutes deux à inviter leurs fidèles à voter pour tel ou tel parti mais réduisent la marge de leur choix en lançant des exclusives : le chrétien peut voter comme il l’entend, jusqu’aux radicaux exclus ; les ligueurs, eux, sont libres de choisir entre les candidats nettement démocratiques et laïques ». Dans les démocraties occidentales, en l’occurrence, les ligues des droits de l’homme et du citoyen s’apparentent souvent à des lobbies parlementaires. Conjointement avec la Ligue de l’Enseignement, la LDH française a ainsi fondé en mai 1984 un comité intergroupe, Cidem (“ Civisme et démocratie ”), qui a réuni ses membres élus au Parlement. D’une manière générale, l’association reflète une sensibilité de gauche, non communiste, et elle a régulièrement appelé à voter François Mitterrand en 1965, en 1974, en 1981 et en 1988. Il lui est néanmoins arrivé d’entretenir de mauvaises relations avec des gouvernements socialistes. En 1998, le Premier ministre Lionel Jospin a boycotté les cérémonies du centenaire de l’organisation et son ministre de l’Intérieur, Daniel Vaillant, a refusé de rencontrer les Ligueurs pour discuter de sa politique sécuritaire et de la régularisation de sans-papiers. 
 
-La proximité de la LDH française avec les réseaux de pouvoir de gauche s’apprécie surtout au niveau des contacts personnels, plus que des liens institutionnels. L’organisation a par exemple compté des personnalités comme l’amiral Antoine Sanguinetti (1917-2004), qui a pris la tête d'une liste socialiste lors des élections municipales de mars 1977 à Toulon et qui a été réintégré dans l'armée par le ministre de la Défense Charles Hernu (PS) en mars 1983. Hostile à la reprise des essais nucléaires par le Président Jacques Chirac en 1995, favorable au démantèlement des Pershing américains et des SS20 soviétiques, proche du Mouvement pour la Paix (lié au Parti Communiste Français), l’amiral Antoine Sanguinetti a beaucoup critiqué la politique étrangère de la France, accusée de servir les intérêts des Etats-Unis. Sur le plan intérieur, il a soutenu le combat des paysans du Larzac contre l'installation d'un camp militaire, dénoncé la négligence de l'Etat en Corse et parrainé la création de l'organisation Ras l'Front contre l'extrême droite en 1990. A la FIDH, il a enquêté sur la dictature militaire en Argentine en 1978. Parmi les présidents de la LDH française, on trouve également de nombreux avocats du PSU, tels Henri Leclerc, Henri Noguères et Yves Jouffa. Exception qui confirme la règle “ socialiste ”, Madeleine Rebérioux (1920-2005) a été exclue du parti communiste français en 1969 pour avoir participé à la création de la revue dissidente Politique aujourd’hui. Membre du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), elle s’est opposée à l’usage de la torture pendant la lutte d’indépendance en Algérie, a participé au comité de soutien à Maurice Andin en 1957, a signé en 1960 un appel pour le droit des conscrits à l’insoumission et s’est prononcée contre la guerre des Américains au Vietnam en 1965. Parmi les présidents de la LDH française, elle fait d’autant plus figure d’exception qu’elle n’est pas avocate, contrastant avec la “ juridicisation ” de l’association. En effet, les professions de juristes, magistrats et professeurs de droit compris, représentent jusqu’à la moitié du comité central de la LDH française dans les années 1970-1990, une proportion autrefois dévolue aux enseignants. Majoritairement salariés du public et diplômés du supérieur, les militants de base, eux, sont très impliqués dans la vie locale : plus de 90% d’entre eux ont été ou restent adhérents de syndicats, d’associations ou de partis politiques. La plupart votent pour ou sont membres du parti socialiste. D’après un questionnaire réalisé en 1994-1996 et cité par Eric Agrikoliansky, aucun ne déclarait avoir appartenu à un parti classé à droite.