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Médecins du Monde - Commentaires




2) Le fonctionnement interne


-A la différence de MSF, encore, le Conseil d’administration de la section française de MDM, élu en assemblée générale et renouvelé par tiers tous les ans, reste mono-national et quasi-exclusivement composé de professionnels de la santé. Le président de l’organisation, par exemple, est un médecin bénévole qui joue un rôle exécutif tout en poursuivant son activité professionnelle. MDM-France garde ainsi un véritable fonctionnement associatif, au risque de ralentir les prises de décision. Le taux de rotation de ses présidents témoigne d’une intense vie démocratique, avec Bernard Kouchner de 1980 à 1982, Pierre Pradier de 1983 à 1984, Alain Deloche de 1985 à 1986, Patrick Aeberhard de 1987 à 1988, Jacques Lebas de 1989 à 1990, Gilles Brücker de 1991 à 1992, Bernard Granjon de 1993 à 1995, Jacky Mamou de 1996 à 1999, Claude Moncorgé de 2000 à 2003, Françoise Jeanson de 2004 à 2006, Pierre Micheletti de 2006 à 2009 et Olivier Bernard à partir de 2009.

-Outre le personnel d’encadrement au siège, MDM fonctionne surtout avec des volontaires et des bénévoles. Un tel système, qui repose sur de fortes motivations, a l’avantage de valoriser des talents parfois ignorés. Mais il présente aussi des inconvénients. A défaut d’être convenablement préparés, remarque Renée Fox, la plupart des expatriés se forment sur le tas et s’avèrent ignorants des réalités sociales et culturelles des terrains où ils sont envoyés. L’organisation compte essentiellement sur leur idéalisme et leur débrouillardise pour pallier aux difficultés. Cité par Anne Vallaeys à propos d’une opération de secours négociée avec la femme du président péruvien six mois après des inondations, le docteur Jean Rigal, qui allait rejoindre MSF en 1983, déplore par exemple le montage de missions sans moyens et sans objectifs : " un truc mondain ". Après avoir travaillé pour MDM au Rwanda en 1994, Annie Faure dénonce pour sa part les insuffisances du recrutement : " un volontaire débouté d’une association finit toujours par se faire embaucher par une autre qui, pressée par l’urgence, ou moins scrupuleuse, ne fouillera pas son passé humanitaire […] Le fonctionnement souple des ONG comporte ses propres revers. Ce système, non lucratif, a peu de comptes à rendre sur le travail effectué hors de nos frontières et, par voie de conséquences, sur les compétences des candidats […] Une fois l’élu lâché à l’étranger, il est difficile au centre d’apprécier la pertinence de son choix. L’information doit circuler. Mesurer la dimension humanitaire d’un expatrié par lettres ou par fax expose à l’erreur. Les ONG responsables envoient régulièrement une personne de leur siège pour contrôler et prendre les décisions qui s’imposent ; le rapatriement le plus souvent. Cependant, des associations traînent à ramener au bercail leurs canards boiteux. Plusieurs raisons expliquent ce retard. Soit la déviation du comportement n’est pas repérée ou étayée par des faits tangibles […] Soit les ONG manquent de volontaires disponibles [et] ferment les yeux, préférant encore "quelqu’un" à "personne" ". Dans l’attente d’un verdict de la justice, MDM refuse ainsi la démission de son coordinateur des programmes " enfants de la rue ", le père François Lefort, et préfère l’envoyer en mission au Libéria en 1996 puis au Congo-Kinshasa en 1997. Accusé d’abus sexuels par des enfants de la rue dont il s’était occupé au Sénégal en 1993 et 1994, celui-ci été mis en examen en France en décembre 1995, poursuivi devant la cour d’assises des Hauts-de-Seine en octobre 2002 et condamné à huit ans de prison en juin 2005 : son comité de soutien se réunissait dans les locaux de MDM.

-Depuis lors, MDM-France a relevé ses exigences et recrute désormais des personnes qui maîtrisent au moins une langue étrangère et ont un minimum de deux ans d’expérience professionnelle. En 2006, l’association comptait ainsi 375 volontaires au siège et en expatriation, auxquels s’ajoutaient 1 700 collaborateurs locaux.