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Secours populaire français
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Secours populaire français - Commentaires




4) La communication


-A ses débuts, le SPF médiatise surtout ses actions avec le soutien d'artistes, tels Pablo Picasso, Yves Montand, Marcel Marceau, Bourvil, Alain Resnais, Gilbert Bécaud, Johnny Halliday, Annie Cordy, etc., etc. A l'instar d'organisations humanitaires comme MSF, il va ensuite développer des stratégies de marketing pour solliciter la générosité des particuliers. Ainsi, avec l'obtention du label de "grande cause nationale" en 1991, il confie pour la première fois sa communication audiovisuelle à des professionnels, l'Agence 154, qui n'ont pas de liens avec le parti communiste.

-Parallèlement, l'association a tenté d'améliorer sa transparence financière, non sans difficultés. Bien que conforme à la réglementation en vigueur, la présentation des comptes révèle en l'occurrence des insuffisances et des lacunes selon l'IGAS (Inspection générale des affaires sociales). Elle conduit en particulier à minorer les charges de fonctionnement. En effet, l'association impute à ses missions sociales des dépenses qui, en réalité, relèvent de ses frais de siège, notamment le « développement de l'Union », c'est-à-dire des fédérations départementales. Dans cette rubrique apparaissent ainsi des charges liées à ses publications, à la diffusion des cartes de donateurs, à la création de comités locaux, aux relations interrégionales, à la formation des élus, à la gestion des legs, au financement des mouvements de jeunes et à une partie de la collecte de fonds ! « Sauf à considérer les membres et les instances du Secours populaire comme des bénéficiaires de la solidarité, écrivent Sylvie Boutereau-Tichet et al., la finalité sociale de ces différentes activités n'est pas avérée. Elles ressortissent plus manifestement à l'organisation et à la structuration de l'association ». Si l'on exclut le bénévolat et les dons en nature pour ne retenir que les actions de solidarité en France et dans le monde, le ratio de mission sociale tombe alors à 58% des ressources en 2002. Au vu des charges de fonctionnement à l'étranger, il apparaît encore moindre pour les projets de développement dans les pays du Sud. La présentation des activités de solidarité internationale sur le site Internet de l'organisation s'est néanmoins améliorée depuis 2005. A l'occasion, elle va jusqu'à mentionner le budget et les bailleurs de fonds de chaque projet. Selon Axelle Brodiez, qui a produit l'étude la plus complète et la plus sérieuse sur le SPF, les archives de l'association sont par ailleurs ouvertes au public et conservées à Roubaix au Centre des archives du monde du travail.

-C'est essentiellement à cause de ses actions dans l'Hexagone que le SPF bénéficie d'une bonne notoriété : 80% des Français connaissent l'organisation selon un sondage de la SOFRES (Société française d'études par sondages) en 1997. Parmi les ONG humanitaires, son nom vient spontanément à l'esprit de 25% des sondés en 2006 si l'on en croit l'IFOP (Institut Français d'Opinion Publique). L'association a en revanche plus de difficultés à se positionner sur les programmes qu'elle mène à l'international. Elle a ainsi lancé en 1979 une campagne de printemps pour contrer la quête du carême au profit du CCFD, puis créé en 1980 une association satellite, les Médecins du Secours, pour résister à la monté en puissance de MSF.

-Dès ses origines, le SPF a toujours pris soin de présenter une façade relativement neutre. Son ancêtre, le Secours populaire de France et des colonies, prétendait déjà, dans sa charte du 1 er novembre 1936, aider « les victimes des toutes conditions sociales, sans distinction d'opinion, de races ou de religions ». Succédant au Secours rouge, l'association avait d'ailleurs été lancée en réponse aux directives de Moscou, qui prônait l'alliance avec le frère ennemi socialiste contre les fascistes et qui, pour cela, mettait en avant la notion élargie de « peuple » plutôt que de « classe ». Dans le même ordre d'idées, le SPF a ensuite voulu se construire comme une organisation de masse après la Seconde Guerre mondiale. A partir de 1959, note Axelle Brodiez, il a effacé le mot « communiste » de son discours officiel. Au contraire, il essayé de mettre en avant une solidarité qui ne connaissait « aucune frontière de pays ou de parti », pour reprendre les termes d'un rapport d'activités présenté en 1957. A son congrès de 1983, encore, il affirmait n'avoir écarté aucun pays d'où lui était parvenu des appels au secours, « quel que soit le régime de son gouvernement ». Depuis la fin de la guerre froide, enfin, il lui est devenu plus facile de se positionner sur une registre humanitaire et neutre en refoulant l'histoire de l'association, quitte à renier ses premiers engagements politiques.

-Au vu de son affiliation au mouvement communiste, le SPF n'en a pas moins produit un discours très orienté politiquement. Ainsi, il a dénoncé les violations des droits de l'homme dans les dictatures, les monarchies ou les pays alliés aux Etats-Unis (Chili, Argentine, Salvador, Afrique du Sud de l'apartheid, Maroc, Israël), mais pas dans les régimes socialistes (Vietnam, Ethiopie, Cuba). Il ne s'est évidemment pas indigné du goulag et, durant sa période stalinienne, il a même vanté les mérites du « travail correctif » dans un numéro du journal La Défense en novembre 1949 : héritier « de la lutte contre le koulak saboteur », le système aurait été « socialement utile », une « école de la dignité humaine » et « une des réussites les plus étonnantes et les plus accomplies du régime » !