>
International Islamic Relief Organisation of Saudi Arabia (al-Ighata al-Islamiya al-'alamiya)
>
Historique

International Islamic Relief Organisation of Saudi Arabia (al-Ighata al-Islamiya al-'alamiya) - Historique




Années 1990


-1991-1995, ex-Yougoslavie : sous le nom d'IGASA, qui correspond à la prononciation locale d' al-Ighatha , l'IIRO finance la création d'un Conseil islamique de l'Europe de l'Est qui est présidé par Jakub Selimoski, le chef de la communauté musulmane en Yougoslavie. Le secrétaire général dudit Conseil, un Soudanais appelé Fatih al-Hassanain, est proche de la junte du NIF (National Islamic Front), au pouvoir à Khartoum, et soutient bientôt la résistance des musulmans encerclés par les Serbes alors que la guerre civile prend de l'ampleur en Bosnie. Après avoir accompli ses études de médecine à Sarajevo, il s'est en effet lié au mouvement nationaliste bosniaque et a fondé à Vienne en 1987 une « agence d'aide pour le tiers-monde », la TWRA (Third World Relief Agency), qui vise à défendre les victimes de confession musulmane. En Bosnie, il aide en l'occurrence Alija Izetbegovic et son parti de l'Action démocratique, le SDA (Stranka demokratske akcije), qu'il fournit en armes et dont il subventionne la publication du journal Ljiljan. Les fonds sont versés aux combattants bosniaques par l'intermédiaire de la TWRA et, selon les estimations disponibles, s'élèvent à un total de $350 millions si l'on cumule l'apport de l'IIRO et des autres ONG panislamistes entre 1992 et 1995. Un tel activisme ne passe évidemment pas inaperçu car on retrouve des cartes d’identité de l’IIRO sur le corps de moudjahidine tués au combat en Bosnie. En juillet 1993 puis avril 1995 à Zagreb, par exemple, la police croate fouille les bureaux de l’IIRO, qui est soupçonnée de cacher des armes. En septembre 1993, encore, les douaniers slovènes de l’aéroport de Maribor interceptent des colis “ humanitaires ” de la TWRA qui proviennent du Soudan et contiennent des armes. En mars 1995, enfin, le gouvernement macédonien ferme le bureau de l’IIRO à Skopje.

-A partir de 1992, Kenya : l'IIRO envoie des secours aux victimes de la sécheresse et aux réfugiés qui fuient la guerre en Somalie. L'organisation travaille surtout dans les provinces du pays à dominante musulmane, à savoir le Nord-Est somali et la Côte swahili. Mais elle est rapidement suspectée de soutenir les fondamentalistes somaliens d'al-Itehad à la frontière kenyane. Sous prétexte d'infraction aux lois d'immigration, ses bureaux sont temporairement fermés par les autorités, qui accusent à mots couverts l'IIRO d'avoir financé l'attentat d'août 1998 contre l'ambassade américaine à Nairobi.

-A partir de 1993, Azerbaïdjan : l'IIRO envoie des secours aux victimes du conflit qui oppose les musulmans azéris aux chrétiens arméniens dans l'enclave du Haut-Karabakh. L'ONG distribue de la nourriture et gère six dispensaires dans trois camps de déplacés azéris. Sous la direction de Mohammed Qasim Aleid, elle s'occupe également d'orphelins et fournit en médicaments des hôpitaux d'Agdash et Bakou. Alors que le conflit diminue d'intensité, elle démarre ensuite des projets agricoles à Agdash à partir de 1995.

-1994-2006, Philippines : présent dans le pays depuis septembre 1991, le beau-frère d’Oussama ben Laden et directeur saoudien de l’IIRO à Manille, Mohamed Jamal Khalifah, est expulsé par les autorités en novembre 1994. Il est en effet accusé d’avoir financé des camps d’entraînement pour les combattants afghans et les sécessionnistes musulmans moro du groupe Abu Sayyaf, spécialisé dans les prises d’otages de touristes. Il est également suspecté d’avoir eu des liens avec une cellule terroriste qui a monté des projets d’attentats contre le président américain Bill Clinton puis le pape Jean-Paul II lors de visites officielles à Manille en novembre 1994 et janvier 1995 respectivement. Selon la police, les fonds transitaient depuis Djeddah par le biais d’une fondation, Ikhwan al-Islimin, dirigée par un certain Ustadz Muslimen. Sur place, relate le Philippine Daily Inquirer du 9 août 2000, ils étaient relayés par la branche locale de l’IIRO, à savoir l’IRIC (Islamic Research and Information Center), montée à Manille en 1993 et dirigée par Ahmad al-Hamwi, un Syrien impliqué dans un attentat en Turquie en 1986 et plus connu sous le nom d’emprunt d’Abu Omar. En pays moro dans le sud des Philippines, les fonds étaient canalisés par un responsable du groupe Abu Sayyaf, Abdul Asmad, qui travaillait pour l’IIRO dans la région de Tawi-Tawi et qui est tué en juin 1994. D’autres employés de l’ONG sont d’ailleurs membres du MILF (Moro Islamic Liberation Front), à commencer par Ustadz Bajunaid Ibrahim, Ustadz Omar Pasigan, Ustadz Abdul Moin Galmac et Abas Candao dans les régions de Zamboanga, Maguindanao, Davao et Cotabato respectivement. Tous ces hommes sont en l’occurrence apparentés à d’éminentes figures de la guérilla moro : le premier est le frère du professeur Moner Bajunaid (un négociateur) ; le second, un cousin d’Ebrahim el Haj Murad (le président du mouvement) ; le troisième, un parent du chef des affaires militaires du MILF à Davao ; le quatrième, un frère de Zaccarias Candao (un conseiller politique). Dans une interview accordée au magazine Newsweek International du 22 octobre 2001, un leader d’Abu Sayyaf confirme pour sa part que « le principal objectif de l’IIRO est d’aider des groupes comme le nôtre ». De fait, les activités humanitaires de l’organisation n’occupent qu’une place résiduelle. Des trente orphelinats que Mohamed Jamal Khalifah prétendait avoir construits, il s’avère qu’un seul a réellement été bâti. Relayant la propagande de Hamoud al-Lahim, un cheikh fondamentaliste, l’objectif était plutôt d’ériger des mosquées à Luzon, un foyer chrétien dans le nord du pays. Les successeurs de Mohamed Jamal Khalifah ne font guère mieux : Mahmud Abd Al-Jalil Afif est impliqué par la justice dans le meurtre en juin 1992 de Salvatore Carzeda, un père catholique de la paroisse de San Jose Gusu à Zamboanga, tandis qu’Abd al-Hadi Daguit ne parvient pas à empêcher la fermeture de facto de la branche philippine de l’IIRO, classée comme une organisation terroriste par les Etats-Unis en août 2006.

-1995, Jordanie : arrêté en décembre 1994 aux Etats-Unis après avoir été expulsé des Philippines, l'ancien directeur de l'IIRO à Manille, Mohamed Jamal Khalifah, est déporté à Amman et traduit en justice. Les services américains le suspectent en l'occurrence d'avoir financé Ramzi Ahmed Youssef, qui est accusé d'avoir monté le premier attentat contre le World Trade Center à New York en 1993. Courant 1995, Mohamed Jamal Khalifah est cependant acquitté par la justice jordanienne alors que, l'année précédente, il avait été condamné à mort par contumace pour un attentat contre un cinéma d'Amman. Placé en résidence surveillée en Arabie Saoudite, le beau-frère d'Oussama ben Laden mourra finalement dans des circonstances mystérieuses lors d'un vol à Madagascar en 2006.

-1996, Israël/Palestine : après la Bosnie et les Philippines, l'IIRO est de nouveau pris dans une controverse sur ses liens avec des mouvements terroristes. En juin 1996, l'organisation dément ainsi soutenir le Hamas.

-A partir de 1998, Albanie : d’avril 1998 à avril 2000, l’IIRO vient au secours des Kosovars qui fuient la répression des troupes serbes et qui se sont réfugiés dans la région de Kukès. Sur le plan médical, l’ONG monte un hôpital de campagne et soutient dix dispensaires dans les camps de Sakrapar, Birat et Kafaya. Sur le plan éducatif, elle imprime 225 000 livres scolaires et organise des classes séparées pour les filles et les garçons. L’IIRO, explique Xavier Pauly, en profite alors pour financer les volontaires qui s’enrôlent dans l’Armée de libération du Kosovo, l’UCK (Ushtria Clirimtare E Kosoves). Frère d’Ayman al-Zawahiri, qui est le bras droit d’Oussama Ben Laden au sein d’al-Qaida, un de ses employés à Tirana, Mohamed al-Zawahiri, devient même un des chefs des forces spéciales de cette guérilla. Présente dans le pays depuis 1992, l’IIRO a en effet constitué un important réseau d’activistes islamistes. D’après Millard Burr et Robert Collins, Mohamed al-Zawahiri a ainsi recruté des militants d’al-Qaida comme Mohammed Hassan Tita en janvier 1993 et Shawki Salama Attiya en août 1995, qui a débarqué du Soudan juste après une tentative d’assassinat contre le président égyptien Mohammed Hosni Moubarak lors d’une visite officielle à Khartoum.

-A partir de 1999, ex-Yougoslavie : suite à l'intervention militaire de l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord) contre les troupes serbes au Kosovo, l'IIRO s'investit massivement à Pristina, Bija et Kosovska Mitrovica, notamment dans le domaine scolaire, auquel elle consacre le tiers d'un budget de onze millions de dollars. L'ONG construit et restaure des écoles où l'on enseigne l'arabe et le Coran et où les élèves méritants se voient accorder des primes qui vont du simple au double suivant qu'il s'agit de filles ou de garçons. L'IIRO développe à cette occasion un enseignement très moral qui, selon ses propres brochures, citées par Xavier Pauly, vise à contenir les « déviations et les égarements » d'un mode de vie occidental. Dans le même ordre d'idées, l'ONG oblige ses employés locaux à se laisser pousser la barbe et à apprendre l'arabe.