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Norwegian Church Aid
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Historique

Norwegian Church Aid - Historique




Années 1960


-A partir de 1960, Norvège : tandis que la Confédération des associations paroissiales est dissoute, la Norwegian Church Relief devient une organisation autonome. Soucieuse de ne pas concurrencer les missionnaires norvégiens déjà présents dans les pays en développement, elle hésite d'abord à étendre ses opérations en dehors du continent européen. Par l'intermédiaire de la Lutheran World Federation , elle va néanmoins s'implanter en Inde, au Bangladesh et en Afrique au cours des années 1960. Une augmentation significative de ses ressources financières lui permet en effet de commencer à se déployer dans les pays du tiers-monde. Très médiatisée, la crise du Biafra au Nigeria se traduit notamment par un afflux de dons, à hauteur de 4 millions de couronnes norvégiennes en 1967, 12,4 en 1968 et 17,9 en 1969, contre 2,9 en 1966. Le développement du marketing permet également de renflouer un budget qui atteint 330 millions de couronnes norvégiennes lors du téléthon de 1986, au lieu de 50 en 1980.

-1962-1970, Nigeria : avec deux agronomes, Jakob Modalsli et Edvard Nordrum Ikwo, la Norwegian Church Relief démarre un projet agricole chez les Ikwo d'Abakaliki dans l'Est du pays. Mais la guerre civile qui éclate dans la région oblige à interrompre le programme lorsque Odumegwu Ojukwu proclame l'indépendance du Biafra en mai 1967. Sollicitée en février 1968 par le Docteur Francis Akunu Ibiam, un presbytérien du Conseil mondial des églises et ancien gouverneur de la région Est de 1960 à 1966, l'organisation essaie alors d'envoyer des secours et se heurte au refus du gouvernement fédéral, qui ne veut pas l'autoriser à ravitailler les sécessionnistes et qui bloque l'arrivée d'un bateau de vivres détourné à Santa Isabel, l'actuelle capitale de la Guinée Equatoriale. Le secrétaire général de la Norwegian Church Relief , Elias Berge, se rend donc en secret à Lisbonne pour tenter de convoyer du cargo dans les avions d'un aventurier américain, Hank Wharton, qui fournit les Biafrais en armes depuis l'île portugaise de São Tomé. Arguant que le blocus des fédéraux contre les rebelles est illégal, l'organisation prend ainsi le risque de violer l'espace aérien nigérian et de mélanger ses vivres au milieu des cargaisons de munitions. Avec ses homologues danois, suédois et finlandais le 26 août 1968, elle monte en l'occurrence un collectif, Nordchurchaid, et se dote d'une compagnie basée à Reyjavik, Flughjalp (« Aide par avion »), pour envoyer de la nourriture à São Tomé. De là, des avions repartent clandestinement pour le Biafra, non sans dangers puisque trois d'entre eux seront bombardés et détruits par les forces fédérales. Au total, la Norwegian Church Relief finance deux des sept millions de dollars dépensés pendant les opérations, auxquelles s'adjoignent des organisations laïques comme Oxfam, Save the Children et la Croix-Rouge internationale à partir de mai 1969. Les vols de nuit effectués depuis São Tomé bénéficient également à un consortium d'une trentaine d'ONG européennes et nord-américaines, le JCA (Joint Church Aid), qui rassemble les Eglises catholique et protestantes et qui est ironiquement rebaptisé Jesus Christ Airlines. A défaut d'interdire explicitement le transport d'armes, le règlement de Nordchurchaid prévoit de contrôler tous les chargements, y compris les équipements automobiles destinés à assurer la maintenance des camions distribuant les vivres à l'intérieur du Biafra. D'abord dirigé d'août à septembre 1968 par le comte Carl-Gustaf Von Rosen, un mercenaire suédois qui monte une petite armée de l'air biafraise en mai 1969, le JCA est en réalité le lien vital qui permet aux rebelles de se ravitailler et de résister encore 19 mois après la perte de leur dernier accès à mer, Port Harcourt, en mai 1968. En effet, les sécessionnistes ne peuvent plus utiliser leurs livres nigérianes depuis que le gouvernement fédéral a introduit une nouvelle devise en janvier 1968. De plus, aucune firme étrangère n'est prête à prendre le risque d'investir dans une enclave ibo qui ne parvient même pas exploiter et vendre son pétrole à cause du blocus fédéral. L’apport des ONG est donc d’autant plus crucial que, selon des témoins comme Alexander Madiebo, les Biafrais vont finir par perdre la guerre par manque d’argent et à cause de l’effondrement complet de leur économie. D’après Kennedy Lindsay, leurs seules sources de devises proviennent en l’occurrence des organisations humanitaires (£4,3 million), des services secrets français (£2 millions) et des donations de la diaspora outre-mer (£750,000), des Ibo du Nigeria (£100,000) et de divers groupes de solidarité en Occident (£100,000). A l'intérieur de l'enclave, l'incidence militaire de l'aide des Eglises est aussi importante à cet égard. A la différence de la Croix-Rouge internationale, note Laurie Wiseberg, le JCA accepte par exemple d'agrandir et d'entretenir l'aéroport d'Uli où sont débarquées les cargaisons d'armes destinées aux sécessionnistes. Cité par John Stremlau, Odumegwu Ojukwu explique que les Biafrais ont eu « pour seule source de financement les devises dépensées sur place par les Eglises en vue de fournir à la population de l'igname et du garri [le manioc local] ». Son chef de la planification militaire, Mike Okwechime, confirme pour sa part que « la guerre a essentiellement été financée grâce aux contributions des organisations humanitaires privées. Beaucoup a pu être détourné pour acheter des armes au marché noir ». Sur un total de 250 millions de dollars, on estime finalement qu'environ 15% de l'aide au Biafra ont été utilisés à des fins militaires. Ce montant, explique Ian Smillie, équivaut à la somme dépensée en devises par le Nigeria pour ses achats d'armes pendant le même laps de temps. Aussi le rôle des humanitaires soulève-t-il de nombreuses questions après la défaite des Biafrais en janvier 1970. Cité par Hugh Lloyd, un officiel du Conseil oecuménique des Eglises (WCC) avoue avoir douté des mérites du JCA « à cause de ses implications politiques... pour les organisations religieuses, accusées d'avoir contribué à prolonger le conflit et les souffrances de la population ». De fait, le WCC, dont la Norwegian Church Relief est membre, a été surnommé War Can Continue  : "la guerre peut continuer".

-A partir de 1965, Bangladesh : par l'intermédiaire d'un missionnaire norvégien, Olav Hodne, la Norwegian Church Relief et la LWF ( Lutheran World Federation ) aident les réfugiés qui ont fui la partition de l'Inde en 1947. Après l'indépendance du Bangladesh et sa sécession du Pakistan en 1970, l'organisation facilite ensuite le retour des populations que les combats avaient précipité dans l'Etat du Bengale occidental en Inde. A cette occasion se forme une ONG locale, le RDRS ( Rangpur Dinajpur Rehabilitation Service ), qui va devenir un partenaire privilégié de la Norwegian Church Relief , tandis que Olav Hodne prend la direction des activités sociales de la LWF en Inde. Outre les projets de développement, la NCA continuera d'envoyer des secours lors de crises comme le raz-de-marée qui fait plus de 7 000 morts dans le sud du Bangladesh en mai 1985.

-A partir de 1969, Zimbabwe : avec la LWF ( Lutheran World Federation ) et le WCC (World Council of Churches), la NCA aide les réfugiés qui fuient le régime de ségrégation raciale en Afrique du Sud. Mais l'organisation est critiquée car les exilés qu'elle soutient appartiennent à des mouvements de lutte armée, tandis que la LWF et la WCC cautionnent l'usage de la violence contre l'apartheid. Avec le Conseil oecuménique de l'Eglise norvégienne pour les Relations Internationales ( Mellomkirkelig Råd ), la NCA désapprouve finalement en 1978 les subventions du WCC à un des mouvements de libération en lutte contre la domination blanche à Harare : un tel financement sort d'un cadre strictement humanitaire et politise l'aide en accordant la préférence à la ZANU (Zimbabwe African National Union) de Robert Mugabe (qui arrive au pouvoir au moment de l'indépendance en 1980) plutôt qu'à la ZAPU (Zimbabwe African People's Union).