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Reporters sans frontières - Commentaires




1) Le mandat


-RSF se rattache au mouvement humanitaire de par sa genèse et ses fonctions. Historiquement, l’association s’est en effet construite dans un esprit « sans-frontiériste », aux côtés de Rony Brauman, en vue d’alerter la communauté internationale sur les crises oubliées. Aujourd’hui, RSF propose par ailleurs une aide matérielle et juridique aux journalistes réfugiés en France.
 
-Influencé par l’expérience d’Amnesty International, RSF a évolué dans la définition de ses missions. Dans un premier temps, la vocation originelle de produire un “ journalisme alternatif ” a disparu au profit de la défense des droits de l’homme et de la liberté de la presse. Depuis lors, RSF s’est rapprochée du fonctionnement d’une organisation corporatiste au service des journalistes, à défaut de jouer le rôle d’un véritable syndicat. Soucieuse de défendre la liberté de la presse dans les pays où elle est le plus menacée, l’association a en fait pris le risque de minimiser ses critiques sur les dérives déontologiques des médias : c’est d’ailleurs en partie sur ces questions que des différends sont apparus entre Robert Ménard, d’une part, et Rony Brauman et Jean-Claude Guillebaud, d’autre part.
 
-RSF se bat en l’occurrence pour la liberté d’expression des journalistes, quels que soient les propos tenus par ces derniers. Pour expliquer la philosophie de l’association, Robert Ménard cite Voltaire : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai pour que vous puissiez le dire librement ». Un pareil positionnement vaut à RSF de nombreuses critiques car il peut revenir à soutenir des journalistes qui écrivent des articles extrémistes, voire révisionnistes et négationnistes. Durant l’été 2007, Robert Ménard a par exemple donné la parole à l’écrivain Alain Soral, un « nègre » du chef du Front National, Jean-Marie Le Pen. Il a également défendu au Tribunal l’humoriste Dieudonné M'bala M'bala, qui était accusé d’avoir tenu des propos antisémites dans un de ses spectacles. En 2011, encore, il a sorti un pamphlet au titre provocateur, Vive Le Pen !, et il a participé aux journées de réflexion de Polémia, un club d’extrême droite dirigé par Jan-Yves Le Gallou, un ancien dirigeant du Mouvement national républicain. En 2014, enfin, il a été élu maire de Béziers sur une liste soutenue par le Front National. Dans son livre publié en 2001, Robert Ménard assure pourtant veiller à dénoncer « le non-respect de leurs devoirs par les journalistes », et pas seulement les « violations des droits de la presse par les gouvernements ».
 
-Depuis que Jean-François Julliard a remplacé Robert Ménard en septembre 2008, l’association développe par ailleurs une approche plus constructive en s’affranchissant du registre de la dénonciation pour promouvoir et défendre la presse tout à la fois. D’une certaine manière, RSF a ainsi renoué avec les expériences de ses débuts, lorsqu’il s’agissait de produire un journalisme alternatif. L’association a par exemple entrepris d’aider les médias haïtiens et pakistanais à se reconstruire après le tremblement de terre et les inondations de janvier et juillet 2010, respectivement. Autre inflexion notable, RSF ne s’occupe plus seulement des violations des droits de la presse dans les dictatures du tiers-monde et couvre aussi des pays développés comme la France. Un pareil élargissement géographique permet notamment à l’association de réagir aux critiques qui l’accusaient de trop se focaliser sur les régimes de gauche hostiles aux Etats-Unis.