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Reporters sans frontières - Commentaires




6) Les rapports avec les forces politiques


-Reconnue d'utilité publique en septembre 1995, RSF entretient de bonnes relations avec les pouvoirs publics en France. Dans toutes les affaires délicates, relate Robert Ménard, l’association établit systématiquement des contacts avec le Ministère des Affaires étrangères et les responsables des droits de l’homme ou de la presse à la Présidence de la République.

-Les actions de RSF contre Cuba et la Libye ont en revanche pu perturber les Nations Unies, qui ont parfois écarté l’ONG de ses sommets ou réunions de travail. Ainsi, l’association a été suspendue de l’ECOSOC (United Nations Economic and Social Council) le 20 mai 2003, puis de la CDH (Commission des Droits de l’Homme) le 24 juillet 2003, à chaque fois pour une période d’un an. RSF a également été déclarée persona non grata lors des Sommets mondiaux de la Société de l’Information (SMSI) organisés par l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) en décembre 2003 à Genève et novembre 2005 à Tunis. Selon Jean-Guy Allard et Maxime Vivas, l’association et son secrétaire général Robert Ménard auraient en fait servi les intérêts de Washington. Les campagnes publicitaires contre Cuba, en particulier, coïncideraient avec les opérations anticastristes du gouvernement américain et de la CIA. Dans le même ordre d’idées, Robert Ménard a été critiqué pour avoir frayé avec l’extrême droite cubaine à Miami en 2004 et soutenu la presse du multimillionnaire Gustavo Cisneros, qui avait approuvé le putsch manqué de Pedro Carmona contre Hugo Chavez en 2002 au Venezuela. Avec la guerre d’Irak, enfin, RSF aurait minimisé les bavures des troupes de Washington contre des journalistes ou des otages. Ainsi, Maxime Vivas accuse Robert Ménard de ne pas avoir suffisamment défendu Mohammed Al Jouni, l’accompagnateur syrien des journalistes Christian Chesnot et George Malbrunot en 2004, alors qu’il était détenu, interrogé et torturé par l’armée américaine sans que la presse ne le sache. D’après cet auteur, encore, RSF aurait accordé trop de crédit à la version des Etats-Unis pour expliquer pourquoi une journaliste italienne prise en otage, Giuliana Sgrena, avait été blessée et prise sous le feu de tirs américains au moment de sa libération. Enfin, l’association se serait empressée de disculper les soldats responsables de la mort de deux correspondants de guerre, Taras Protsyuk de Reuters et José Couso de Telecinco, lors d’une attaque contre l’hôtel Palestine à Bagdad en 2003 : en 2007, un juge de Madrid, Santiago Pedra, n’avait pas ces scrupules et émettait un mandat d’arrêt international contre trois des militaires américains que RSF avait "blanchis". Les accusations portées par Jean-Guy Allard et Maxime Vivas doivent toutefois être mises en perspective avec les sympathies politiques de ces deux auteurs. Ainsi, Jean-Guy Allard, québécois d’origine, travaille à la rédaction de l'édition internationale de Granma, le journal officiel de La Havane. D’après Vincent Brossel, responsable de l’Asie à RSF depuis 2000, l’association serait en réalité devenue une cible de choix des mouvements de gauche latino-américains quand les sympathisants castristes ont vu leur soutien populaire ébranlé par la vague d’arrestation de dissidents à Cuba en 2003. Concernant les tirs de l’armée américaine contre l’hôtel Palestine à Bagdad, il convient par ailleurs de noter que RSF a commandité à Jean-Paul Mari un rapport qui, en 2004, concluait à des meurtres et recommandait la reprise d’une enquête officielle. La famille de José Couso a cependant refusé que la section espagnole de RSF s’associe à sa plainte, et elle a récusé Jean-Paul Mari en arguant que celui-ci avait interviewé les militaires américains et non les autres journalistes espagnols présents dans l’hôtel, poussant l’indélicatesse jusqu’à remercier l’armée des Etats-Unis pour son « aide précieuse ».