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Oxford Committee for Famine Relief
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Historique

Oxford Committee for Famine Relief - Historique




Années 1980


-A partir de 1980, Ouganda : suite à la chute du régime Idi Amin Dada en 1979, Oxfam-UK peut reprendre ses activités dans le pays et intervient notamment dans les régions semi-arides du Nord. Avec SCF, l'organisation fait alors pression sur le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) pour obtenir la reprise des convois de vivres qui avaient été suspendus en direction du Karamoja, où sévit la sécheresse en 1980. A cette époque, ACORD (Agency for Co-operation and Research in Development), une ONG parrainée par Oxfam-UK lors de sa création en 1976, travaille également dans le Nord, à Gulu, où elle monte une coopérative, la WACU (West Acholi Co-Operative Engineering Union), pour redémarrer une manufacture de charrues qui date de 1963 et qui ne fonctionne quasiment plus depuis qu'elle a été confisquée aux Indiens par le régime Idi Amin Dada en 1972. Mais la production d'engins agricoles répond difficilement à une demande qui connaît de forts pics saisonniers. Victime d'un endettement excessif, la WACU ne parvient pas à rembourser les prêts contractés auprès d'ACORD et à poser les bases d'un véritable site industriel. Malgré une subvention qui s'élève à £500 000 en dix ans, le projet s'avère trop ambitieux. Mal géré, il ne résiste pas à la concurrence des charrues importées, beaucoup moins chères, et à la reprise de la guerre dans le Nord en 1986, qui perturbe les activités agricoles. Tandis que le dernier technicien expatrié d'ACORD part en 1988 et que les autorités ordonne une enquête sur des détournements de fonds, l'atelier de Gulu doit licencier du personnel et fermer ses portes en 1990. Après l'arrivée au pouvoir en 1986 du président Yoweri Museveni, qui stabilise la situation dans le Sud, Oxfam-UK continue cependant de financer des ONG locales comme ACFODE (Action for Development). Créée le 19 novembre 1985 par des universitaires de Makerere pour défendre les droits de la femme, celle-ci est officiellement enregistrée en 1989. En compétition avec de nombreuses ONG féministes, elle connaît cependant un sort comparable à la WACU. ACFODE, en l'occurrence, est très dépendante des financements étrangers, qui représentent 97% d'un budget de $470 000 en 1998, avec des subventions de la Fondation Konrad Adenauer, de World Vision , du Mennonite Central Committee et des agences de coopération suédoise, danoise et britannique. L'afflux d'argent est tel que des dirigeants de l'ONG détournent des fonds et sont renvoyés en 1998. Autre membre de la mouvance Oxfam, NOVIB commence pour sa part, en 1987, à subventionner l'UWFCT (Uganda Women's Finance and Credit Trust), la branche ougandaise, créée en 1984, d'une organisation internationale (la Women's World Banking) lancée à la suite des résolutions prises en faveur des femmes à la Conférence de Mexico de 1975. Centrée sur la région de Kampala, l'UWFCT est censé faciliter l'accès des paysannes au crédit mais coûte cher. Ses frais administratifs grèvent plus de 80% de son budget en 1995 selon Roger Riddell et Mark Robinson. Plutôt que d'appuyer des ONG locales, Oxfam-UK monte par ailleurs ses propres programmes pour venir en aide aux réfugiés soudanais ou aux déplacés ougandais dans le Nord du pays. A partir de 1994, l'organisation oeuvre ainsi à soutenir l'autosuffisance alimentaire de quelques 55 000 Soudanais à Ikafe et Imvepi dans le district d'Arua. Mais ses efforts sont perturbés en avril 1996 par les guérilleros du WNBF (West Nile Bank Front) de Jumas Oris, qui veulent perturber la tenue d'élections et s'en prennent à des réfugiés perçus comme alliés à leurs ennemis de la SPLA (Sudan People's Liberation Army). Après avoir dû « racheter » ses véhicules volés et avoir vu ses bureaux attaqués à Bidibidi, Oxfam-UK se résout en juin suivant à évacuer sur Arua son personnel local et expatrié. Les réfugiés, eux, s'en retournent au Soudan où dans les localités frontalières de Yumbe et Koboko. Faute de pouvoir reprendre ses programmes agricoles, Oxfam-UK, dont un chauffeur est tué à Yumbe en avril 1997, organise des secours d'urgence et licencie une bonne partie de son personnel, tandis que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés décide de fermer le site d'Ikafe et de transférer ses derniers occupants à Imvepi et Imvepi. Au final, les efforts d'Oxfam-UK, sont réduits à néant alors que la réinstallation trop rapide des déplacés ne laisse pas le temps de préparer les nouveaux terrains. Dans un rapport non publié et cité par Monica Kathina Juma, Barbara Harrell-Bond, une anthropologue spécialiste de la région, critique ainsi l'organisation car les infrastructures qu'elle a construites ne bénéficient pas aussi aux autochtones et sont abandonnées quand les réfugiés partent soudainement à partir d’avril 1996. Les programmes de la décennie suivante ne convainquent pas non plus. Soucieux de protéger les victimes de l’insécurité qui vont chercher refuge dans les villes du Nord, Oxfam impose en 2004 un quota de 30% de femmes parmi les travailleurs recrutés pour construire des abris autour de la bourgade Kitgum. Résultat, des mères de famille se retrouvent à creuser des tranchés avec leur bébé dans le dos, tandis que d’autres sont employées comme veilleurs de nuit, un travail dangereux au vu des nombreuses attaques de bandits. Pour Adam Branch, l’intervention d’Oxfam auprès des déplacés de la région pose même un problème de responsabilité pénale. A partir de septembre 1996, les Acholi du Nord de l’Ouganda ont en effet été regroupés de force à l’intérieur de camps ravitaillés par les humanitaires et « protégés » par l’armée en vue de vider les campagnes et d’isoler les rebelles de la LRA (Lord Resistance Army). Les agences d’aide ont ainsi contribué à pérenniser et contrôler des sites qui, sans elles, n’auraient pu perdurer sans provoquer des émeutes locales ou des protestations jusque dans la capitale Kampala. Partant, elles ont perpétué une crise humanitaire qui n’aurait pas eu lieu d’être si les paysans avaient été autorisés à retourner chez eux cultiver leurs terres. Elles ont également légitimé la stratégie de l’armée ougandaise dans un pays très bien coté par la Banque mondiale et, d’une manière générale, la communauté internationale. A en croire Adam Branch, une telle politique de regroupement n’aurait pas été « possible sans l’assistance des humanitaires ». Relativement aux obligations des Conventions de Genève de 1949, il s’agit pourtant d’un crime de guerre du fait que des civils ont été placés dans des camps contre leur volonté, qu’ils n’y ont pas été protégés et que leur enfermement ne répondait à aucune nécessité militaire, par exemple au moment d’une offensive de l’armée ougandaise. Dans un pays où, précisément, la Cour pénale internationale a engagé une procédure contre la LRA, les humanitaires devraient donc répondre de leurs actes. Leur complicité paraît d’autant plus évidente que les convois d’aide sont escortés par l’armée et que l’accès aux camps est dûment régenté par des représentants du pouvoir qui menacent de couper les vivres si les Acholi ne votent pas en faveur du gouvernement.

-A partir de 1981, Brésil : Oxfam-UK et NOVIB commencent à financer l'Institut brésilien d'analyses sociales et économiques, IBASE. Etabli à Rio de Janeiro en 1981, cet organisme d'information et de consultance veut promouvoir les idéaux d'une société égalitaire et d'une démocratie participative. Il s'inscrit clairement dans la mouvance de l'opposition travailliste et refuse toute subvention du gouvernement jusqu'à la chute du régime du général João Baptista de Oliveira Figueiredo en 1985. Ainsi, IBASE (Instituto Brasileiro de Análises Sociais e Econômicas) travaille uniquement avec la centrale syndicale du Partido dos Trabalhadores, la CUT (Central Unica dos Trabalhadores), et non avec la CGT (Confederaçâo Geral dos Trabalhadores). A partir de 1983, l'Institut s'engage dans une campagne nationale de réforme agraire qui vise à redistribuer les terres et l'oppose aux petits et moyens propriétaires regroupés dans une Union démocratique rurale, l'UDR (Uniao Democratica Ruralista). Par l'intermédiaire de son directeur, IBASE s'investit également dans la lutte contre le sida en lançant une ONG spécialisée, l'Association interdisciplinaire sur le sida (ABIA). Jusqu'en 1989, Oxfam-UK finance par ailleurs le Conseil national des paysans du caoutchouc, présidé par Jaime da Silva Araujo, et le syndicat des travailleurs agricoles de Xapuri dans l'Etat d'Acre, dont le leader, Chico Mendes, est assassiné par un propriétaire foncier en décembre 1988. Oxfam-Canada, pour sa part, soutient des organisations tiers-mondistes comme la FASE ( Federação de Órgãos para Assistência Social e Educacional , qui date de 1961), le MOC ( Movimento de Organização Comunitária , fondé par l'Eglise catholique en 1967 ) et le CEAS ( Centro de Estudos e Ação Social , lancé par les Jésuites en 1967). A partir de novembre 1994, enfin, NOVIB subventionne les recherches d'un groupement écologiste, les Amis de la Terre ( Friends of the Earth ), pour constituer un dossier sur les dégâts environnementaux et humains du projet gouvernemental de colonisation agricole de Planafloro dans l'Etat de Rondônia. Le 14 juin 1995, NOVIB dépose sa plainte à la Banque mondiale, qui finance le projet dans la lignée du très controversé Plan Polonoroeste.

-A partir de 1982, Liban : Oxfam-UK travaille en zone musulmane à Beyrouth Ouest au moment de l'invasion israélienne de 1982 et des bombardements de la population civile en 1983. Très médiatisée, la crise suscite beaucoup d'engouement parmi les organisations humanitaires et les bailleurs de fonds. Constatant que les besoins sur place sont déjà couverts, le Comité d’Oxford décide en conséquence de se retirer. Un journaliste qui travaillait pour Oxfam-America, Dan Connell, reproche alors à l’organisation de ne pas s’engager politiquement dans le conflit pour ne pas heurter la sensibilité de ses donateurs. En octobre 1993, il fonde à Boston une ONG beaucoup plus radicale et partisane, Grassroots International, qui n'envoie pas d'expatriés outre-mer, refuse les subventions du gouvernement américain et préfère financer directement des mouvements de lutte armée comme l'EPLF (Eritrean Peoples Liberation Front) en Ethiopie ou l'Union of Palestinian Working Women's Committee, une émanation de l'OLP (Organisation de Libération de la Palestine) dans les territoires occupés par Israël. Entre-temps, Oxfam-UK est en fait revenu travailler au Liban. Mais, en mars 1988, l'organisation doit négocier la libération de deux employés, le Britannique Peter Coleridge et le Syrien Omar Traboulsi, enlevés et libérés cinq jours après par le groupe Abou Nidal lors d'une visite dans un camp de réfugiés palestiniens à Sidon. Lors de bombardements israéliens dans le Sud du Liban en 1996, Oxfam fournit par ailleurs des secours aux villageois déplacés par le conflit.

-1983-1985, Éthiopie : Oxfam-UK intervient de part et d'autres des lignes de front au moment où se profile une famine que le régime du colonel Mengistu Hailé Mariam tente en vain de masquer. Depuis Khartoum, au Soudan, le Comité d'Oxford mène notamment des opérations transfrontalières et clandestines à destination des régions du Nord tenues par les guérilleros de l'EPLF (Eritrean People's Liberation Front) et du TPLF (Tigray People's Liberation Front) en lutte contre la junte au pouvoir à Addis-Abeba. Par le biais de l'ONG britannique War on Want à partir de 1982, l'organisation travaille en l'occurrence avec l'ERA (Eritrean Relief Association) et la REST (Relief society of Tigray), qui émanent de l'EPLF et du TPLF respectivement. Oxfam légitime ainsi ces organismes en certifiant leur vocation humanitaire et en confirmant que les guérillas contrôlent effectivement le Tigré et l'Erythrée. Du fait de sa laïcité, le Comité d'Oxford rechigne cependant à participer à la plate-forme de l'ERD (Emergency Relief Desk) qui, à partir du Soudan en 1981, coordonne les actions transfrontalières des ONG chrétiennes, au premier rang desquelles la Lutheran World Federation. Dans les zones aux mains du gouvernement en Éthiopie, l'organisation démarre par ailleurs des distributions alimentaires. Réalisé grâce à la logistique d'Oxfam, un reportage de Michael Buerk, diffusé sur la BBC (British Broadcasting Corporation) le 23 octobre 1984, révèle l'ampleur de la famine et alerte la communauté internationale. En revanche, l'organisation ne signale pas les méfaits de la junte, qui préfère dépenser ses devises pour acheter des armes et qui arrête toute importation de blé entre 1982 et 1984. A la différence de Médecins sans frontières, qui est expulsé en décembre 1985 après avoir dénoncé le problème, le Comité d'Oxford ne dit rien non plus des exactions de l'armée, qui utilise la logistique humanitaire pour vider le Nord de l'Éthiopie, déporter la population vers le Sud et priver ainsi les guérillas du soutien de la paysannerie. Au contraire, les sections britannique et américaine d'Oxfam participent bientôt à un programme de collectivisation agricole au cours duquel les autorités détruisent plus de 30 000 villages traditionnels en vue de « recaser » près de 10 millions de paysans sur 15 000 nouveaux sites en 1988. Le Comité d'Oxford sait pourtant à quoi s'en tenir puisqu'il est également présent en Somalie dans les camps de réfugiés éthiopiens qui commencent à fuir ledit programme à partir de décembre 1985. Après la chute de la dictature et l'arrivée au pouvoir du TPLF en 1991, l'organisation continue ensuite de financer la REST et aide les victimes du conflit frontalier avec l'Erythrée en 1999. Mais le raidissement du nouveau régime ne facilite pas non plus la tâche. Après les élections frauduleuses de mai 2005, le principal partenaire d'Oxfam dans le pays, la Christian Relief and Development Association, est accusée d'activités politiques par le pouvoir, qui lui reproche d'avoir dénoncé la manipulation du scrutin.

-A partir de 1984, Soudan : sous la direction de Guy Stringer, qui a remplacé Brian Walker à la tête de l'organisation en octobre 1983, Oxfam-UK, qui menait jusqu'alors ses programmes depuis Nairobi au Kenya, ouvre un bureau à Khartoum en 1984 afin de secourir les victimes de la famine dans le Darfour et le Kordofan à l'Ouest du pays. A Kebkabiya dans le Darfour, le Comité d'Oxford essaie par exemple de favoriser l'autosuffisance alimentaire des paysans en fournissant des ânes de trait et en établissant des coopératives de semence censées desservir plus d'une centaine de villages alentour. Sous l'égide des représentants de comités élus à parité entre femmes et hommes, ledit programme est transféré en 1994 à une ONG montée pour l'occasion avec le ministère des Affaires sociales, la KSCS (Kebkabiya Smallholders Charitable Society). La difficulté, explique Peter Strachan, le responsable du programme entre 1987 et 1990, est que les salaires des employés d'Oxfam, très supérieurs à ceux de la région, n'incitent guère les autochtones à travailler pour la KSCS. Cette dernière ne paraît pas viable sans financements extérieurs. Les cotisations de ses membres sont insignifiantes et la commercialisation de ses services de vétérinaire fournit à peine un quart d'un budget qui s'élève à £40 000 en 1995, contre £2 650 000 pour Oxfam sur l'ensemble du Soudan. En outre, la question se pose de savoir dans quelle mesure la KSCS peut être vraiment démocratique, continuer d'assurer la parité des sexes et rester performante après avoir écarté de ses instances dirigeantes un bon nombre d'employés locaux d'Oxfam en dépit de leurs compétences professionnelles. Des problèmes d'un autre ordre se posent également en ce qui concerne les Dinka du Sud qui ont fui la guerre en s'installant à Khartoum et à qui le Comité d'Oxford donne des chèvres, des ânes et des carrioles pour démarrer des activités génératrices de revenus et se déplacer facilement au cas où ils seraient chassés de leurs aires de squatting. La police, en l'occurrence, profite de l'aubaine pour confisquer les animaux en accusant les Dinka de vol et Oxfam doit aller négocier la libération des suspects. Dix ans après, Mark Duffield, qui avait travaillé sur le projet en 1986, constate que l'organisation reproduit les mêmes erreurs dans les camps de déplacés d'Abu Matariq, El Goura et Adilla près d’Ed Daen. Là, les autochtones se saisissent de l'occasion pour récupérer les ânes et les carrioles des Dinka sous prétexte de recouvrer leurs créances, quand ce ne sont pas les déplacés eux-mêmes qui revendent le matériel. Les difficultés sont bien aussi marquées dans le Sud en guerre. Ainsi, remarque un spécialiste, Sofrono Efuk, les semences et les outils agricoles fournis par Oxfam tout au long des années 1990 sont détournés et ne permettent nullement aux populations déplacées de se nourrir elles-mêmes dans les régions du Haut Nil et de l'Equatoria. Le chercheur s'interroge notamment sur la naïveté de l'organisation et son obstination à financer des ateliers de couture pour créer des activités génératrices de revenus alors que les femmes ne peuvent pas résister à la concurrence des commerçants du Nord, qui vendent moins cher des vêtements d'occasion. Les problèmes proviennent également des tensions politiques locales. A Akot dans le Bahr el-Ghazal en 1996, des expatriés d'Oxfam-UK sont brièvement arrêtés par les autorités, qui n'ont pas de prise sur les programmes d'aide car l'organisation essaie délibérément de les contourner. Du côté gouvernemental, le Comité d'Oxford travaille en l'occurrence depuis la ville de Juba en 1986 et l'insécurité l'oblige en 1990 à évacuer le personnel expatrié et à laisser les programmes de distributions alimentaires entre les mains de ses employés locaux. De l'autre côté des lignes de front, c'est depuis la base de Lokichokio, à la frontière kenyane, que le Comité d'Oxford démarre des opérations en zone rebelle lorsque les Nations Unies lancent l'Opération Lifeline Sudan en 1989. La difficulté est que la principale guérilla de la région, la SPLA (Sudan People's Liberation Army), exerce de nombreuses pressions pour capter et contrôler l'aide humanitaire. En mars 2000, ladite guérilla finit par expulser les ONG qui refusent de se plier à une convention avalisant et formalisant les « prélèvements » de la rébellion. En juin suivant, Oxfam-UK se résout alors à signer un accord qui le protège mal des interférences de la SPLA. Malgré des espoirs de paix au Sud en 2003, l'extension du conflit à l'Ouest du pays complique encore la tâche. En novembre 2004, notamment, Oxfam est menacé d'expulsion après avoir demandé à l'Union européenne et à l'ONU d'exercer des pressions pour obliger le Soudan à arrêter les violences de son armée et de ses milices dans le Darfour. Le directeur de l'organisation à Khartoum est contraint de quitter le pays. En juin 2006, l'organisation doit par ailleurs fermer son bureau de Saraf Omra alors qu'un de ses chauffeurs enlevé un mois auparavant, Nouraldeen Abdalla Nourein, reste introuvable (il sera tué le 28 juillet suivant lors d'un affrontement dans le village de Helelat près de Kulbus). Après s'être fait voler cinq véhicules, encore, les employés d'Oxfam sont victimes de violences et contraints, le 18 décembre 2006, d'évacuer Gereida, une localité du sud du Darfour tenue par les rebelles de la SLA (Sudan Liberation Army). Après le braquage d'une autre voiture, l'organisation doit également suspendre ses activités dans la ville d'Um Dukhum le 23 avril 2007. Suite au mandat d’arrêt lancé par la Cour pénale internationale (CPI) contre le chef de l’Etat soudanais Omar el-Béchir le 5 février 2009, Oxfam est finalement expulsé du Darfour.

-A partir de 1985, Indonésie : NOVIB appuie et relaie en Occident une campagne de la Fondation de l'Institut indonésien d'aide juridique, la YLBHI (Yayasan Lembaga Bantuan Hukum Indonesia), contre la construction d'un barrage qui oblige à déménager manu militari 5 000 familles de la vallée de Serang sur l'île de Java. L'objectif n'est pas de demander l'arrêt du projet mais d'obtenir des compensations pour les habitants déplacés. Financé par la Banque mondiale, le barrage de Kedung Ombo est finalement inauguré en 1989. Oxfam-UK, pour sa part, continue de mener des programmes de développement et s'investit massivement dans le pays pour aider les victimes du tsunami de décembre 2004. Face à un afflux record de dons, l'organisation est pressée de dépenser immédiatement les fonds reçus alors qu'il ne s'agit bientôt plus d'une urgence mais d'une opération de reconstruction à long terme. A Aceh, notamment, Oxfam-UK s'engage un peu trop rapidement dans la fourniture de logements qui, édifiés à la va-vite, doivent ensuite être démontés parce que situés dans des zones inondables. A Blang Oi en décembre 2005, relèvent John Telford et al., l'organisation revient par exemple sur sa promesse de reconstruire 330 maisons.

-1986-1996, Honduras : parallèlement au Conseil oecuménique des Eglises protestantes, à l'ONG britannique Christian Aid, à l'agence catholique hollandaise CEBEMO (Centrale voor Bemiddeling bij Medefinanciering van Ontwikkelingsprogramma), aux Danois de Danchurchaid, aux Suédois de Diakonia, aux Suisses de HEKS (Hilfswerk der Evangelischen Kirchen Schweiz), aux Américains de la Fondation Ford et aux Allemands de Brot für die Welt, Oxfam-UK participe au financement du CODEH (Comité para la Defensa de los Derechos Humanos de Honduras), une organisation de défense des droits de l'homme lancée en 1983 par un médecin, Ramón Custodio. L'appui du Comité d'Oxford permet de contourner l'opposition des évêques catholiques du pays, qui tentent en vain de monter leur propre organisation de défense des droits de l'homme et qui se méfient des menées « subversives », voire « communistes », de Ramón Custodio. De fait, le CODEH repose sur des comités régionaux, les CODDERHH (Comités Regionales de Defensa de los Derechos Humanos de Honduras), montés en 1979 par un Jésuite américain, le père James Carney « Guadalupe ». Actif chez les paysans du nord du Honduras depuis 1962 et adepte de la théologie de la libération, celui-ci avait été expulsé en novembre 1979 et devait mourir en juillet 1983, capturé et tué par l'armée alors qu'il avait rejoint le pays clandestinement depuis le Nicaragua avec les guérilleros du PRTC (Partido Revolucionario de Trabajadores Centroamericanos) de Reyes Mata lors d'une offensive dans la région frontalière de Olancho. Ramón Custodio, lui, est suspecté par la junte de Tegucigalpa d'être lié au parti d'extrême gauche Cinchoneros et d'être responsable de la mort du vice-président du CODEH, Miguel Angel Pavón, vraisemblablement assassiné par des paramilitaires, en janvier 1988. Le Comité gagne cependant en légitimité grâce aux financements d'Oxfam-UK et surtout de la CEBEMO, qui, à elle seule, fournit un quart du budget de l'organisation entre 1984 et 1995, notamment avec des subventions du gouvernement hollandais. Le CODEH, qui ouvre six bureaux régionaux en 1990 et dont les effectifs passent de un à vingt-quatre employés de 1985 à 1996, monte en puissance et élargit son mandat aux droits économiques, sociaux et culturels, quitte à prendre des positions politiques susceptibles de gêner ses bailleurs de fonds en Europe. Après 1984, le Comité ne dénonce plus seulement les exactions de la junte militaire au pouvoir, mais démarre aussi des programmes de sensibilisation aux droits de l'homme, fournit une assistance juridique aux victimes des forces de sécurité et défend des communautés indiennes. En juillet 1988 et janvier 1989, il obtient un premier succès lorsqu'il gagne les procès intentés à l'Etat du Honduras devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme à propos de Manfredo Velásquez et Saúl Godínez, deux syndicalistes enlevés et assassinés par 1es forces de sécurité en septembre 1981 et juillet 1982. En juillet 1993, il parvient ensuite à faire condamner le colonel Ángel Castillo Maradiaga et le sergent Santos Eusebio Ilovares Fúnez, responsables du viol et du meurtre d'une jeune étudiante, Riccy Mabel Martínez, en juillet 1991 ; l'affaire marque les débuts de la fin de l'immunité des militaires, peu avant le retour des civils au pouvoir. La consécration vient avec la légalisation du CODEH en novembre 1994, suite à l'élection, en novembre 1993, du président Carlos Roberto Reina Idiaquez, qui est un ami personnel de Ramón Custodio. Concurrencé par la Commission des droits de l'homme mise en place par le gouvernement en 1992, le CODEH se transforme alors d'une plate-forme de protestation à un forum de proposition, dans une optique plus constructive. Lors d'un séminaire organisé à Tegucigalpa en 1993, il propose ainsi de démilitariser la police, de renforcer le pouvoir judiciaire et de démanteler les services de renseignements, réformes qui seront effectivement menées par le nouveau président. Il continue également de réclamer le jugement des militaires responsables d'exactions et participe en 1995 à l'exhumation des corps des victimes, identifiés afin d'engager des procédures juridiques. Sous la férule de Ramón Custodio, le problème est que le CODEH s'adapte mal aux changements en cours. En effet, la répression militaire a d'abord obligé le Comité à travailler dans l'opacité et la quasi-clandestinité, avec des militants anonymes et un président omnipotent puisque seul connu du public. Le centralisme démocratique et l'autoritarisme de Ramón Custodio ont conduit en 1989 au départ d'une majorité des employés, dont Bertha Oliva, qui est parti présider une organisation d'aide aux familles des disparus, le COFADEH (Comités Familiares de Desaparecidos de Honduras). Pour autant, Ramón Custodio a continué sa gestion monopolistique. Il refuse notamment de partager ses informations, d'accorder des postes de responsabilité aux femmes, de prendre en compte les demandes des comités régionaux et de coordonner ses actions avec d'autres associations en participant à la Plataforma de Lucha, une alliance des partis de gauche financée en 1990 par la fondation allemande FES (Friedrich Ebert Stiftung). L'absence de transparence, de démocratie interne et de rapports financiers devient un motif de récrimination des bailleurs de fonds et Oxfam-UK prend ses distances avec le CODEH à la suite de Brot für die Welt et de Danchurchaid , qui décident d'arrêter leurs subventions en 1992 et 1996 respectivement ; seuls CEBEMO et Diakonia, principaux soutiens du Comité, ne souhaitent pas remettre en cause Ramón Custodio.

-A partir de 1987, Tchad : Oxfam-UK, qui a ouvert un bureau à N'djamena en 1986, s'étend à Moundou dans le Sud et y démarre des programmes de développement agricole. Les efforts de l'organisation se heurtent cependant à de nombreux problèmes. En 1993, Paul Starkey constate par exemple que les financements accordés à une ONG locale, l'ASSAIL (Association d'appui aux initiatives locales de développement), ne bénéficient pas aux paysans les plus pauvres. Les soubresauts de la vie politique empêchent par ailleurs de mener les projets à terme. Aussi le Comité d'Oxford renonce t'il à poursuivre l'expérience, préférant se lancer dans des activités de plaidoyer. En novembre 1998, il rejoint ainsi la campagne de protestation démarrée en décembre 1997 par les Allemands de Misereor et Brot für die Welt contre l'exploitation des gisements de pétrole de Doba, que la Banque mondiale prévoit de financer. Les Espagnols d'Intermón prennent rapidement le relais des Britanniques d'Oxfam-UK, qui ferment leur bureau tchadien en décembre 1998. Plutôt que l'abandon du chantier, l'organisation demande en l'occurrence le respect de l'environnement et des populations concernées. Sa position nuancée est d'autant moins facile à défendre qu'en Occident, l'opinion publique penche pour un rejet pur et simple du projet. Pour échapper au procès d'intention, la difficulté est également de prouver que la Banque mondiale et les compagnies pétrolières ne pourront pas mettre en oeuvre sur le terrain les garanties qu'elles offrent sur le papier. Mais la brutale répression gouvernementale contre les protestataires met vite en évidence les carences des compensations qui sont proposées. Le versement des indemnités, notamment, occasionne des tensions car il se limite au seul tracé du pipe-line et exclut les villageois des alentours, tout autant affectés par les chantiers et le percement de nouvelles routes sur leurs terres. Lors d'une conférence organisée à Bébédjia en avril 1999, les participants à la campagne de protestation demandent un moratoire à la Banque mondiale : en vain puisque celle-ci accepte officiellement de financer le projet en juin 2000 et que le premier baril est extrait en octobre 2003. Par la suite, les efforts se concentrent alors sur le suivi du chantier et la gestion de la manne pétrolière. Mais les activités des ONG mobilisées à ce sujet sont limitées par le caractère informel et éclaté de leur réseau. « Il n'y a pas de procédures d'adhésion, expliquent Martin Petry et Naygotimti Bambe. Tous ceux qui s'engagent font partie du réseau. On ne connaît pas le nombre exact d'organisations et de personnes actives. Le réseau est un forum ouvert à tous. Il n'a même pas de nom. » « Peu transparent », assez « chaotique », il ne parvient pas à planifier des stratégies et des objectifs communs. Sur place, il est divisé en trois plates-formes régionales à N'djamena, à Doba et dans le Moyen-Chari. Faute d'attirer les Tchadiens du Nord, qui ne sentent pas concernés, il apparaît essentiellement comme une affaire de Sudistes. Au niveau national, les tentatives de concertation ne durent pas non plus : la Commission pétrole du Comité inter-liaison des ONG tchadiennes, par exemple, périclite car son secrétaire général est muselé par la police avant d'être licencié en 2000, suite aux pressions de ses bailleurs, savoir Brot für die Welt et Oxfam. Le gouvernement, pour sa part, soutient ou monte de toutes pièces des coordinations concurrentes qui approuvent le projet de la Banque mondiale alors qu'une bonne partie de la population croit à un prochain Eldorado et est favorable à l'extraction du pétrole. A leur corps défendant, des ONG internationales se retrouvent quant à elles impliquées dans les activités du réseau. MSF-France, Africare et World Vision-Canada protestent publiquement lorsqu'ils découvrent leur nom sur la liste des signataires de la conférence de Bébédjia : ils craignent en effet d'être politisés à leur insu, au risque d'être expulsés du pays, et se plaignent de la négligence des organisateurs du réseau, qui n'ont pas consulté chacun des membres des comités de liaison d'ONG.

-A partir de 1988, Salvador : présent dans le pays depuis 1970, Oxfam-UK réoriente ses activités alors que démarrent des négociations de paix entre la guérilla et le gouvernement. A l'époque, l'Amérique latine représente, avec les Caraïbes, environ un cinquième des dépenses opérationnelles de l'organisation, proportion qui ne varie pas fondamentalement dans les années qui suivent (18% en 1989, 16% en 1990, 17% en 1991, 15% en 1993, 13% en 1994, 13% en 1995, 12% en 1996, 17% en 1997, 26% en 1998, 15% en 1999, 15% en 2000, 21% en 2001, 19% en 2002). Concernant l'Amérique centrale, le Salvador fait partie des pays en guerre qui, avec le Nicaragua, le Guatemala et le Honduras, retiennent particulièrement l'attention d'Oxfam-UK. Le Comité d'Oxford y appuie en l'occurrence des programmes de soutien à la transition démocratique et des projets de reconstruction en faveur des réfugiés qui reviennent dans la région de San Vicente. Suite au Conseil oecuménique des Eglises, à la Lutheran World Federation, aux Suédois de Diakonia, aux Allemands de Brot für die Welt et aux agences hollandaises catholique CEBEMO (Centrale voor Bemiddeling bij Medefinanciering van Ontwikkelingsprogramma) et protestante ICCO (Interkerkelikje Coördinatie Commissie voor Ontwikkelingsprojecten), Oxfam-UK commence ainsi, en 1990, à financer les activités du Comité permanent de débat national, le CPDN (Comité Permanente del Debate Nacional), une organisation favorable à des négociations de paix entre l'armée et les guérilleros du FMLN (Frente Farabundo Martí para la Liberacíon Nacional). Lancé en 1988 par le recteur de l'Université d'Amérique centrale à San Salvador, Ignacio Ellacuría, que les militaires soupçonnent de conseiller la rébellion, le CPDN bénéficie de l'appui des réseaux protestants car il compte des personnalités comme l'évêque luthérien Medardo Gómez et est dirigé par un Baptiste secrétaire du Conseil des Eglises salvadoriennes, Edgar Palacios. Assez vite, il perd cependant le soutien de l'Eglise catholique, qui lui reproche de se politiser et de servir de façade officielle au FMLN avant l'entrée au Parlement des partis d'opposition lors des élections de mars 1991. De fait, le Comité organise le 14 décembre 1991 une grande marche de protestation qui rassemble plus de 100 000 manifestants contre les initiatives de paix de l'extrême droite hostile à la réduction des effectifs des forces armées, à savoir Unidad y Paz 91 et Cruzada pro Paz y Trabajo. Paradoxalement, Oxfam-UK accroît ses subventions au moment même où le CPDN perd de son importance, quand les négociations de paix entamées en avril 1990 aboutissent à la signature des accords de Chapúltepec en janvier 1992. Avec un budget multiplié par quatre en quatre ans, le Comité, qui table sur des ressources de 1,6 million de dollars pour les élections de mars 1994, s'avère incapable de dépenser ses fonds et se crée une réserve qui lui permet de subventionner d'autres associations et d'organiser des manifestations de rues au lieu de développer sa capacité d'autofinancement. Selon Kees Biekart, l'erreur d'appréciation des bailleurs de fonds s'explique par leur lenteur à débloquer des subventions, la tendance du CPDN à grossir ses besoins financiers, l'absence d'évaluation, un manque de coordination entre les agences d'aide et une mauvaise analyse politique sur le rôle de l'organisation après les accords de paix.

-A partir de 1989, Zambie : à l'occasion d'un séminaire organisé par ses soins, Oxfam-UK prépare opportunément les équipes locales à la sécheresse qui frappe l'Afrique australe trois ans plus tard. En juin 1992, des comités élus et composés pour moitié de femmes se chargent ainsi de distribuer les vivres gratuits du Programme Alimentaire Mondial en prenant soin de ne pas concurrencer et ruiner l'agriculture locale. Si des sacs de maïs sont parfois détournés, une telle approche permet de subvenir aux besoins à court terme sans compromettre la relève des cultures vivrières à plus long terme.