>
Secours populaire français
>
Historique

Secours populaire français - Historique




Années 1950


-1950- 1953 , Vietnam : après avoir créé une association France-Vietnam en 1946, le SPF démarre une grande campagne en faveur de Henri Martin, un quartier-maître de la Marine nationale. Révolté par le bombardement des habitants du port de Haiphong en 1946, celui-ci avait dénoncé la répression coloniale et été emprisonné, condamné une première fois pour sabotage en octobre 1950 et finalement libéré en août 1953. Cette campagne, au cours de laquelle Henri Martin n'est jamais présenté comme un militant communiste, permet au SPF d'élargir sa base sociale, de renflouer ses caisses et d'augmenter le nombre d'adhérents, qui passe de 8 000 en 1950 à 9 000 en 1951, 7 000 en 1952 et 14 000 en 1953.

-1951-1968, France : après avoir assuré la défense juridique des grévistes électriciens en avril 1950 puis des mineurs d'Auchel en septembre suivant, le SPF soutient les dockers de Calais qui s'opposent aux réquisitions du gouvernement en janvier 1951, les agents de la RATP (Régie autonome des transports parisiens) en mars puis les postiers en avril. A l'époque, l'organisation est toujours très proche de la CGT (Confédération générale du travail) : un bon nombre de volontaires du Secours adhèrent au syndicat, dont deux secrétaires nationaux (Henri Raynaud en 1948 puis Jules Duchat en 1953) deviennent vice-présidents de l'association. En janvier-février 1962, encore, le SPF aide ainsi les grévistes de Decazeville. Dans le même ordre d'idées, il soutient les victimes d'accidents du travail dans les mines de Marcinelle en août 1956, Courrières en janvier 1957, Carmaux en octobre 1965, Gardeannes en février 1969, Fouquières-le-Lens en février 1970 et Liévin en décembre 1974, les poudreries de Saint-Just-en Ardèche en avril 1962 et du Finistère en août 1975, la carrière de Champagnole en août 1964, la raffinerie de Feyzin près de Lyon en janvier 1966 et des usines à Méru en mai 1967 et Nevers en mai 1969. A mesure que la tutelle du PCF se relâche, le SPF tend cependant à développer une approche moins syndicale et plus apolitique des conflits sociaux. Il abandonne l'assistance juridique aux inculpés et recentre ses activités sur l'aide matérielle aux familles : organisation de cantines populaires pour les manifestants à travers tout le pays en mai 1968 ; envoi de secours aux grévistes du Joint Français à Saint-Brieuc en avril 1972, des usines Herpé de Champigny à Paris et Lip à Besançon en juillet puis août 1973, des établissements Ugine-aciers à Saint-Louis-du-Rhône en juin 1975, etc.

-1952-1978 , Grèce : dans un pays où il était déjà intervenu pendant l'insurrection de 1947, le SPF demande en vain la grâce du chef de la résistance communiste, Nikos Beloyannis, qui est exécuté en avril 1952. A près le coup d'Etat d'avril 1967, le SPF soutient ensuite les opposants à la dictature des colonels, qui a l'appui des Etats-Unis. Faute d'être autorisé à envoyer des avocats dans le pays, il envoie des médicaments aux prisonniers politiques par l'intermédiaire du CICR (Comité International de la Croix Rouge). Jusqu'en 1978, il aide également les exilés grecs en France et entreprend de négocier leur amnistie pour faciliter leur retour au pays après la restauration d'un régime civil en 1974.

-Juin 1953, Etats-Unis : le SPF se mobilise en faveur des époux Julius et Ethel Rosenberg, exécutés après avoir été accusés d’avoir livré des secrets militaires à l’URSS. A la demande du PCF, le SCF lancera également en 1971 une campagne pour obtenir la libération d'Angela Davis, une militante communiste des Black Panthers.

-A partir de 1954, Algérie : le SPF envoie des secours aux victimes du séisme d'Orléansville en septembre 1954. Tandis que démarre la guerre d'indépendance contre le colonisateur français, il lance ensuite une campagne de souscription pour financer le voyage d'avocats qui s'en vont défendre des opposants politiques après le vote de la loi sur l'état d'urgence le 3 mars 1955. En mars 1956, il décide alors d'assurer une présence permanente dans chacun des trois tribunaux militaires d'Alger, Constantine et Oran. Constatant de nombreuses illégalités juridiques et atteintes aux libertés constitutionnelles, il dénonce bientôt l'usage de la torture dans un opuscule publié en mai 1957. En mars 1958 et septembre 1959, encore, il critique les regroupements forcés de population à Blida et Berrouaghia. En mai 1959, enfin, il révèle l'existence du bagne de Timfouchi et proteste contre la détention des suspects au milieu du désert dans des sites qu'il compare à des « camps de concentration », notamment à Aflou, Ain-Amara, Chellal et Guelt-Es-Stell. Sur le plan juridique, il demande la grâce des condamnés à mort algériens et exige la libération des soldats français emprisonnés pour avoir dénoncé la torture. A Paris, il condamne également les brutalités policières contre des manifestants algériens le 17 octobre 1961 et envoie des secours aux blessés . Dans la même veine, il participe à la manifestation de Charonne en février 1962 et assure la défense des intérêts des victimes de la répression qui s'ensuit. Son engagement politique en faveur des indépendantistes ne fait plus aucun doute : autant il offre une aide juridique, morale et matérielle aux victimes des attentats commis en France par les colons de l'OAS (Organisation de l'Armée secrète) à partir de 1961, autant il n'a rien proposé de tel aux victimes des attentats perpétrés par le FLN (Front de Libération Nationale) en Algérie. Sur place, le SPF a envoyé à Alger un bateau qui a accosté en février 1956 malgré le refus des autorités militaires françaises et qui a ravitaillé la Casbah grâce à l'entregent d'un clandestin du Secours populaire algérien, Chérif Djemad. Par la suite, l'organisation est plutôt passée par Rabat au Maroc pour donner des ambulances au Croissant Rouge algérien et aider les réfugiés regroupés à la frontière. Après l'indépendance de l'Algérie, le Secours populaire continue en 1963 d'envoyer des vivres pour les enfants poliomyélitiques et aide les aveugles.

-1955, France : Julien Lauprêtre devient en 1955 le secrétaire général du SPF à la suite de Pierre Eloire (en poste depuis 1952), d'André Ménétrier (depuis 1950), de Charles Désirat (depuis 1948) et de Pierre Kaldor, à qui le PCF reprochait la faiblesse et l'insuffisante politisation de l'organisation. Lui-même membre du parti, où il a été responsable des jeunesses communistes de 1949 à 1950 puis secrétaire du député Raymond Guyot de 1951 à 1953, Julien Lauprêtre reste seul aux commandes quand est abolie la fonction de président, tenue de 1948 jusqu'à sa mort par l'architecte décorateur Francis Jourdain (1876-1958). Sous son impulsion, le SPF va élargir son champ d'action des ouvriers procommunistes aux pauvres en général ; dans le même ordre d'idées, les bénéficiaires de ses colonies de vacances ne seront plus seulement les enfants de martyrs de la résistance, de syndicalistes licenciés ou de militants communistes, mais aussi des orphelins ou des jeunes issus de familles sinistrées, malades, divorcées, alcooliques ou au chômage. Le succès de « l'insurrection de la bonté » de l'abbé Pierre (Henri Grouès) en 1954 est une source d'inspiration à cet égard. En 1956, le SPF commence à se préoccuper des personnes âgées et noue des contacts avec l'Union des vieux de France, dont un des directeurs est le père de Julien Lauprêtre. Concernant les handicapés, l'association collabore également avec l'Association des paralysés de France, dont le fondateur et secrétaire général, Jean-Yves Buisson, sera membre du comité national du SPF de 1965 à 1981.

-1956, Hongrie : le SPF passe complètement sous silence la répression de la révolte de Budapest par les Soviétiques. A la différence des organisations humanitaires, il n'essaie pas non plus de secourir les Hongrois qui vont trouver refuge en Autriche ou en Yougoslavie.

-1957, France : le SPF, qui se réunit en Congrès à Vénissieux, décide de fournir une assistance juridique à 47 jeunes qui refusent de servir sous les drapeaux parce que le général Hans Speidel, un ancien chef d’état-major de la Wehrmacht à Paris pendant la Seconde Guerre mondiale, vient de prendre le commandement des forces terrestres du secteur Centre Europe Nord de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, dont la France se retirera en 1966). Tous fils de martyrs de la résistance, ces appelés du contingent ne veulent pas effectuer leur service militaire dans des troupes françaises placées de facto sous les ordres d’un Allemand autrefois au service d’Adolf Hitler. Internés, ils seront libérés suite aux pressions du SPF.

-1958, France : le SPF appelle à rejeter le référendum constitutionnel en faveur de la Vème République et du général Charles de Gaulle. C'est cependant la dernière fois que l'association accepte de relayer les consignes de vote du parti communiste et de prendre position avant une élection. Selon Axelle Brodiez, l'association commence en effet à s'affranchir de la tutelle du parti, qui continue de guider les actions mais impose moins ses directives. Autonome à défaut d'être vraiment indépendante dans une relation de subordination, le SPF acquiert ainsi une certaine marge de manoeuvre. Auparavant, c'était le parti qui décidait de ses prises de position, par exemple pour le désarmement et l'interdiction de la bombe atomique avant les premiers essais nucléaires de l'URSS en 1949. A la demande du PCF, le Secours allait par exemple collecter des signatures pour l'Appel de Stockholm de 1950, fondateur du Mouvement de la Paix d'obédience communiste, et relayer la campagne en faveur de Henri Martin en 1951. Par la suite, en revanche, le SPF n'attend pas les mots d'ordre du PCF pour prendre la défense en 1956 d'Alban Liechti, un soldat réfractaire qui refuse de participer à la guerre coloniale en Algérie et qui, condamné à la prison, est finalement libéré en 1958 et affecté à des travaux agricoles en Corse.